Dans « Héritage », Cédric Eeckhout raconte sa mère et le monde

© Bea Borgers

Écrit et mis en scène par Cédric Eeckhout, Héritage est une performance racontée, dansée et habitée, qui raconte le lien unissant un fils, Cédric, à sa mère, Jo.

Jo, la maman de Cédric Eeckhout, née après guerre dans la classe plus que moyenne, aurait pu être anonyme. Au final, un deux-en-scène -une chanteuse et une régisseuse se joignent aussi au duo- pour une mise en abyme des liens familiaux et de l’histoire d’un monde. Un moment de partage à l’esthétique à la limite du kitsch sans jamais y tomber, qui mêle archives VHS familiales, confrontation de souvenirs, travestissement maîtrisé, chant lyrique et régie sur scène. Emportant d’un bout à l’autre et parlant à tous. Rencontre.

Cédric Eeckhoudt © stéphane piti

Quel est le point de départ du spectacle?

Ma performance From Here I Will Build Everything, une mise en parallèle entre divorce et démantèlement de l’Europe pendant laquelle ma mère cuisinait des frites. Dans sa forme longue, The Quest, elle jouait son propre rôle. On a été en résidence dans plusieurs pays et questionné des gens sur leur séparation. Puis, ça a été le Covid. Puis, le mari de ma mère est mort. Des moments difficiles à vivre. À la même époque, j’ai rencontré l’œuvre d’Annie Ernaux, notamment Une femme, avec cette intro incroyable: “Écrire (…) en restant en deçà de la littérature”. Sa façon de lier intime, artistique et politique a tout déclenché.

Comment avez-vous procédé?

Ona été en résidence durant trois semaines chez ma mère. On poussait les meubles du salon, elle parlait de son histoire, on la filmait. Puis, on a travaillé avec mon dramaturge qui voulait du conflit. Difficile avec ma mère, elle nettoie tout. Mais on y est arrivés. Quand elle parle de son père volage en disant que “c’est la faute des femmes s’il trompait ma mère”, par exemple: il fallait ne pas nier d’où elle vient, mais la mettre face à aujourd’hui.

Le spectacle, en quelques mots?

L’héritage, c’est ce qui vient de ma mère. Une mère dont je n’ai jamais eu honte. Je voulais raconter que je suis un homme qui ne voulait pas être comme ceux qu’il a connus. Raconter les Trente Glorieuses, avoir tout: joie, enfants, mariage, confort matériel. Puis quand tout explose. Raconter cette mère à qui ni la société ni le père n’ont permis de faire des études, qui est devenue coiffeuse et a eu quatre fils. Je lui ai dit: “On va faire une œuvre de ta vie”. En faisant du théâtre “en deçà” du théâtre.

Héritage **** de Cédric Eeckhout, du 06 au 15/12, au Théâtre Les Tanneurs, Bruxelles, en coprésentation avec le Varia.

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