Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

reloaded – Héros des années 80, superstar des années 90, REM a-t-il enfin trouvé sa place dans les années 2000? Réponse avec Accelerate, quatorzième album enlevé.

Distribué par Warner. En concert le 3/07 au festival Rock Werchter.

Dans les années 80, REM fut le plus grand groupe de radio universitaire du monde. Dans les années 90, le plus grand groupe de rock de la planète. Le lien entre les deux? A priori aucun. Logiquement, REM n’aurait jamais dû sortir de la première catégorie. Sauf qu’il y a eu Out of Time, et son tube Losing My Religion. L’affaire a pris une autre dimension, même si génétiquement, le groupe n’était certainement pas tout à fait programmé pour les stades et les prairies de festival bondées. Soit. Michael Stipe, Peter Buck, Mike Mills et Bill Berry en ont pris leur parti. Ils en ont même tiré un chef-d’£uvre, Automatic For The People (1992).

Mais que faire après? Arrivé au pied des années 2000, le quatuor d’Athens, Géorgie, s’est posé mille fois la question. Bill Berry parti entretemps, comment gérer ce statut de supergroupe? Quelle pertinence peut encore amener la musique de REM? Cela a donné Reveal (2001) et Around The Sun (2004), présentés à chaque fois comme le retour aux glorieuses années, un des meilleurs crus de REM. Aujourd’hui, on le réalise mieux: on était loin du compte.

FREE YOUR MIND

Que penser alors de ce quatorzième album? Dans le livret du CD, une citation de Houdini: « My brain is the key that sets me free ». « Mon cerveau est la clé qui me libère. » Mais George Clinton aurait aussi pu faire l’affaire: « Free your mind, and your ass will follow.  » Non pas que REM se soit lancé dans de longues jams de space-funk, loin de là. Mais voilà: fini de tergiverser, de ruminer. Arrêter de traîner la patte et remettre les mains dans le cambouis, voilà la seule option envisageable. Si le groupe veut encore dire quelque chose, qu’il le dise haut et fort, ont dû conclure Stipe, Buck et Mills. Dès l’entame du disque, Stipe explique ainsi que le poison s’est infiltré dans la vie qu’ils rêvaient de mener. Que faire? Living well is the best revenge, conseille le premier titre citant George Herbert, poète et homme d’Eglise anglais du 17e. Le morceau fonce donc droit devant, toutes guitares dehors. Pour le coup, le geste apparaît un peu forcé, pas vraiment naturel. Il tient plus de la déclaration d’intention, qui est davantage maîtrisée sur les deux titres suivants: Man-Sized Wreath et le single Supernatural Superserious. Plus loin, les orgues plombent le ciel de Houston, première accalmie, mais qui ne dure pas plus de deux minutes. REM, toujours engagé politiquement, enchaîne ensuite avec le frontal Until The Day Is Gone, mais c’est encore sur Mr Richards qu’il retrouve une maestria mélodique imparable.

Dans tous les cas, le groupe évite de perdre son temps. Intitulé Accelerate, le disque n’atteint pas les 35 minutes, mais parvient quand même à enfiler 11 chansons. Dont certaines – pas toutes, loin de là – sont en effet à rapprocher des meilleures £uvres de REM. Mais là n’est peut-être pas l’important: savoir si Accelerate arrive à la cheville de Murmur ou Automatic for the People. La bonne nouvelle est peut-être simplement l’album en soi. Et ce qu’il véhicule comme message. Le disque se termine ainsi avec Stipe chantant: « Music will provide the light you cannot resist ». L’un des plus grands groupes rock en activité peut encore mettre le poids de ce titre entre parenthèse, retrouver l’envie, la musique, et se laisser simplement guider par elle. Puisqu’au bout du compte, c’est tout ce qui reste.

u www.remhq.com

LAURENT HOEBRECHTS

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