Lola retrouvée – Lola Montès, chef-d’ouvre maudit de Max Ophuls, ressort en version restaurée. Un pur joyau, débordant d’étrangeté et de modernité.

Lola Montès

De Max Ophuls. Avec Martine Carol, Peter Ustinov, Anton Walbrook. 1 h 55. Sortie: le 18/12.

L ola Montès, chef-d’£uvre oublié de Max Ophuls, qui ressort sur les écrans dans une magnifique version restaurée, et l’on peut non seulement parler d’événement, mais surtout d’un bonheur rare. Réalisé en 1955, le film portait à son sommet l’art du cinéaste, auteur notamment de Lettre d’une inconnue et de Madame de… Il offrait aussi à Martine Carol, touchée par une grâce figée, un rôle inoubliable, de même d’ailleurs qu’à Peter Ustinov.

Ambitieux et original, Lola Montès n’en ferait qu’un flop plus retentissant, avant d’être remonté, sans plus de succès, par ses producteurs – double coup du sort dont ne se remettrait jamais Ophuls, qui devait mourir peu après sans plus avoir tourné. C’est donc un film maudit que l’on peut aujourd’hui retrouver et réapprécier – à la fois dans sa magnifique étrangeté, et dans son incontestable modernité.

Tout commence dans les ors d’un cirque, dont le Monsieur Loyal (Peter Ustinov) annonce  » un monstre sanguinaire aux yeux d’ange« . Et voilà Lola Montès (Martine Carol), femme au destin d’exception rabaissée au rang de phénomène de foire; clou d’un spectacle passant en revue ses amants, célèbres, et scandales, divers, avant qu’elle le ponctue quotidiennement de son saut de la mort. Déchéance cruelle d’un être qui est ici jeté en pâture à un public avide de sensations – la société du spectacle et ses dérives, déjà. Public qui, titillé par le bateleur de service, y va de ses commentaires, approbateurs ou non, tandis que défilent, comme en un ballet funèbre, les aventures galantes de Lola, que l’on retrouve aux côtés de Franz Liszt, avant de la voir au bras du roi de Bavière, parmi d’autres, ballotée au gré du mouvement de son temps et des humeurs des hommes.

Merveille de film

Ce destin, Ophuls le met en scène en une série de tableaux successifs qu’il articule en autant de flash-back. Merveille de films, qui épouse des contours flamboyants en même temps qu’il creuse les douleurs d’une âme trahie, non sans entraîner le spectateur dans une ronde échevelée – en parfait contrepoint avec la noirceur du propos. Une ronde qui culmine d’ailleurs dans un final intensément poignant et vertigineux, où Lola semble comme transcender son humaine condition.

Mis en scène avec une formidable inventivité, alliant baroque rutilant et insondable mélancolie, cet incandescent portrait de femme n’en finit pas de bouleverser, en même temps que le film trouve des résonances multiples. Un pur chef-d’£uvre d’une ravageuse beauté.

www.sddistribution.fr

Jean-François Pluijgers

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content