Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Finn lame – L’Allemand Patrick Zimmer propose quelques-unes des plus belles mélancolies du moment. Âmes sensibles, précipitez-vous!

« The Best Low-Priced Heartbreakers You Can Own »

Distribué par Pias.

On a toujours besoin d’un plus malheureux que soi. De ce point de vue, on peut compter sur Finn, alias Patrick Zimmer, étudiant en design intégré, vivant à Hambourg. Avec The Best Low-Priced Heartbreakers You Can Own, son troisième album, on tient en effet un des disques les plus jouissivement mélancoliques de l’hiver. Personne ne nous contredira: il est parfois utile de combattre le mal par le mal. Or le vague à l’âme de l’Allemand a des vertus d’autant plus thérapiques qu’il est sublimé ici par de vrais moments de grâce. Dès le départ, avec Half Moon Stunned, on ne peut qu’être pris par cette guitare sèche qui ose la beauté simple et directe, bientôt rejointe par la voix de fausset délicate de Zimmer (celle-ci n’étant pas sans faire penser à celle de Jónsi, chez Sigur Rós).

Significatif: le disque est découpé en cinq actes, tel une tragédie grecque. « Disons que ce n’était pas la période la plus facile de ma vie à ce moment-là. On grandit, on perd certaines personnes… Je suis arrivé à un point où les chansons que j’écrivais faisaient partie de ma tragédie personnelle. Cela m’a amené à les structurer en reprenant ces différents mouvements classiques, en vague. »

Enregistré quasi seul, le disque navigue ainsi entre folk pastoral, orchestration flamboyante ( Julius Caesar) et résonance médiévale. On apprend d’ailleurs que l’album a principalement été enregistré dans les caves d’une église du 14e siècle. « Elle appartient à un fan, qui était venu me voir après un concert pour me proposer d’y jouer. Par après, il m’a proposé d’enregistrer là. Il pensait que cela pouvait amener quelque chose. Et il a eu raison! Je suis un grand fan d’écho, par exemple. Or je préfère qu’il soit authentique plutôt que créé par l’ordinateur. C’était donc parfait. Puis c’est intéressant de se retrouver un peu en dehors de la réalité, dans cet endroit sombre et froid. Rien ne peut vous perturber. »

Ironie

Tout cela peut sonner évidemment très sérieux. Mais quand on rencontre Patrick Zimmer, le bonhomme est tout sauf sinistre. La tragédie n’est, il est vrai, jamais très loin de la comédie… « Hearts of Roses , par exemple, peut être vu comme un clin d’£il ironique au Bed of Roses de Bon Jovi. J’ai toujours trouvé ce titre incroyable: ce n’est pas possible d’intituler une chanson comme ça! », rigole-t-il. De même, l’artwork entourant le CD présente notamment une photo noir et blanc de Finn, pleine de grain, qui pourrait presque passer pour une peinture classique. « J’avais les portraits de Rembrandt en tête, c’est vrai. Evidemment, à nouveau, cela peut paraître très prétentieux – le NME m’en a fait le reproche. Mais ce n’est pas à prendre aussi au sérieux. C’est comme le titre du disque. C’est du second degré. Il y a tellement de commerce aujourd’hui dans l’art. On peut faire un album parfait, mais s’il se vend, tout à coup, il en devient encore meilleur. L’art est devenu un produit. Faire de l’art, c’est comme s’acheter un t-shirt aujourd’hui. » On ne lui donnera pas tout à fait tort.

www.myspace.com/finndot

Laurent Hoebrechts

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