ENTRE OCTOBRE 1979 ET DÉBUT 1984, ANNIK HONORÉ ORGANISE À LA RAFFINERIE UNE SÉRIE DE CONCERTS -JOY DIVISION, ECHO & THE BUNNYMEN, THE FALL, VIRGIN PRUNES, SCRITTI POLITTI- QUI SANCTIFIENT LA GÉNÉRATION NEW WAVE. FLASH-BACK (SENTI)MENTAL.

Annik Honoré (1957) revient de Dour où elle a affronté deux jours de boue. Cette brune aux yeux verts, à la fois réservée et prolixe, n’a rien perdu de ses amours rock: rentrée malgré elle dans la mythification anglaise -compagne de Ian Curtis avant sa mort brutale-, Annik eut un rôle pivot dans l’avènement de la nouvelle vague, principalement britannique, invitée à se produire à la Raffinerie en ses électriques débuts.  » En 1979, j’habitais à Londres où je travaillais à l’Ambassade de Belgique et je connaissais déjà un peu les gens de Factory et de Rough Trade, scène où tous ces groupes émergents se croisaient, partageaient les mêmes affiches. Par l’intermédiaire de Michel Duval (futur fondateur des Disques du Crépuscule avec Annik, ndlr), le Plan K m’a demandé d’organiser des concerts à la Raffinerie, et le premier a été Joy Division le 16 octobre 1979. » Comme tous les autres prétendants à la Rue de Manchester (…), JD sera payé entre  » 300 et 500 livres »(450 et 750 euros de l’époque), fera le déplacement en malle Douvres-Ostende, logera à l’Hôtel Van Belle, chaussée de Mons ou au Central en face de la Bourse. Les riders ne comportent pas plus de douze lignes, le backstage est à l’étage et les deals se font par lettres et téléphone.  » On travaillait aussi par télégrammes délivrés par le facteur », précise Annik en soulignant  » que ces groupes, Joy Division, les Slits, The Fall ou les Virgin Prunes, étaient flattés de déclencher un intérêt à l’étranger. On les prévenait aussi de la nature du lieu, une usine désaffectée qui présentait de la danse contemporaine, de la vidéo, du cinéma: l’endroit ayant une âme qui, de fil en aiguille, donnait envie aux autres d’y venir et d’y retrouver une forme de magie. Les Bunnymen ont donné quatre concerts au Plan K, sans que l’on doive passer par leur agent, y compris quand ils étaient sous contrat avec Herman Schueremans (Monsieur Werchter et futur patron belge de Live Nation, ndlr), d’ailleurs pas vraiment ravi de la chose. » Alors malgré l’acoustique caverneuse de la salle du rez-de-chaussée, les sonos pas toujours top, la Raffinerie saisit cette nouvelle vague d’outre-Manche en temps réel, goulûment, dans l’absolue sensation de nouveauté musicale.  » Il y avait d’autant plus une forme de bonne franquette, précise Annik, que beaucoup de ces groupes venant de la province anglaise, polis, nous prenaient pour des Bruxellois un peu snobs. J’ai un souvenir fabuleux de Birthday Party avec Nick Cave, plutôt timide, courtois, et de la sortie d’après concert dans une boîte à Bruxelles. » Peu importe qu’Annik travaillera bénévolement (…), puis avec un contrat qui ne rendra personne riche:  » Après trois ou quatre ans, il était devenu clair que les concerts ne rapportaient pas vraiment de l’argent et que la Raffinerie était chère à faire tourner ces soirs-là. Le marché du rock s’est peu à peu cadenassé, la bonne franquette était terminée, cette période particulière s’est éteinte… » En même temps qu’une partie charnelle de l’usine métamorphosée. l

PH.C.

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