A la télé ce soir : The Who: Pile et faces

© Fabrice Demessence

Pour beaucoup, parfois même sans le savoir, ils se limitent au générique des Experts et à un type qui chante sa génération en faisant semblant de bégayer. Les Who sont pourtant l’un des groupes les plus importants, aventureux, complexes et flamboyants de l’Histoire du rock. Parfois pompiers, mais avant tout pyromanes. Sex, drugs and rock’n’roll. La bande à Pete Townshend (le groupe est en quelque sorte sa créature) a transformé la pop music en un champ de bataille et d’exploration à la fois sonore et littéraire. D’accord, ils voulaient mourir avant d’être vieux. Mais qui étaient vraiment les Who? Ces porte-voix d’une jeunesse déclassée et revancharde corsetée par le puritanisme. En 52 minutes (ce qui n’est pas une mince affaire), l’ancien journaliste des Inrockuptibles Christophe Conte brosse le portrait de quatre types qui ont fait dialoguer le rock et l’avant-garde.

Il y a le chanteur Roger Daltrey, petit Teddy Boy teigneux qui s’est fait virer de toutes les écoles et transfère sa colère à l’aide d’une guitare qu’il s’est fabriquée lui même dans une tôlerie. Keith Moon, l’infatigable et spectaculaire batteur au regard de chien fou. Le bassiste John Entwistle. Puis surtout donc le guitariste Pete Townshend, roi du moulinet, qui se souvient de travailler sur sa guitare devant le miroir en essayant de réduire la taille de son nez… Blousons de cuir contre parkas. Rockabilly contre rhythm and blues. Si Roger est plutôt rockeur, Pete se considère comme un Mods. Qu’importe, les Who vont créer un style bien à eux. Grandiloquent et destructeur. Dégoûté qu’I Can See for Miles, sa meilleure chanson, n’ait pas marché, Townshend nourrit l’ambition pompeuse, dingue et ridicule d’écrire un opéra rock sur un sourd-muet aveugle qui devient le messie (et champion de flipper) après qu’une acid queen lui a filé des stupéfiants. Meher Baba, qui a changé le rapport de Townshend au monde, Daltrey et sa chevelure à l’état sauvage après avoir usé les fers à défriser… Tommy, le Live at Leeds, leur passage incandescent à Woodstock, Who’s Next… La mort de Keith Moon, les albums sans éclat du début des eighties et les accusations de recours à la pédopornographie… Dit par Mélanie Doutey, nourri par des archives rares et des interviews de Townshend, Pile et faces raconte les types intellectuels et impulsifs qui ont créé l’opéra rock, enflammé la mèche du hard rock et popularisé la destruction de matos. “Une charge contre le matérialisme et la mauvaise qualité des guitares américaines.” Une contextualisation bien ficelée (suivie du Live à Hyde Park) pour un groupe défricheur et sauvage.

Documentaire de Christophe Conte.

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