Critique | Scènes

« Kevin » ou l’échec du système scolaire décrypté sur scène

3,5 / 5
© Jérôme Van Belle
3,5 / 5

Titre - Kevin

Mise en scène - Arnaud Hoedt, Jérôme Piron, Antoine Defoort et Clément Thirion

Compagnie - Compagnie Chantal & Bernadette

Date - Du 05 au 19/12

Lieu - Au Studio 12 (pour Le Vilar) à Louvain-la-Neuve

Casting - Arnaud Hoedt, Jérôme Piron

Après La Convivialité, Jérôme Piron et Arnaud Hoedt reviennent défoncer les codes de l’école moderne et ses inégalités intrinsèques.

Ça commence en mode participatif. Flèche en main, chaque spectateur oriente sa réponse à une question posée sur l’écran en fond de scène. Ça commence light: votre couleur préférée? Votre niveau d’étude? Votre niveau socio-économique par rapport à celui de vos parents? Votre idée de l’esthétique? Etc. Les réponses données sont analysées en temps réel. Les résultats, en pourcentages, s’affichent à l’écran, définissant un portrait statistique de l’assistance. L’ambiance est potache et détendue. Ça se poursuit comme une entrée de ring, la musique de Rocky en fond sonore. Jérôme Piron et Arnaud Hoedt arrivent en scène, parfaitement parfaits dans leur non-costume de profs: jeans, chemise, baskets, mains dans les poches. La scénographie est simple: l’écran en fond de scène, et trois bancs rangés côté cour, histoire de figurer l’école.

Kevin n’est pas Joséphine

Les deux comparses commencent par parler de Kevin, cet élève qu’ils n’ont jamais compris et qui ne les a sans doute jamais compris. Durant 90 minutes, pause récré comprise -ce sera un jeu vidéo participatif, on ne vous en dit pas plus, sauf que personne ne monte sur scène ou ne donne de sa personne-, les deux anciens profs vont disséquer la vie scolaire actuelle. Des sociologues, psychologues, scientifiques et profs, qu’ils ont interrogés longuement, passent à l’écran et donnent le substrat nécessaire et essentiel aux théories qu’ils développent. Des théories basées tant sur l’Histoire de l’enseignement que sur leurs observations d’anciens enseignants qui voyaient des élèves réussir et d’autres galérer. Et ils en ont vu beaucoup galérer, dans leur classe de 2 Diff (comme différencié, pour l’institution, difficile, pour les élèves… et les profs): l’influence socio-économique sur la réussite des enfants, celle du prénom qu’ils portent, les biais cognitifs induits, etc. Parce que Kevin aura moins de chance que Joséphine à l’école, c’est prouvé statistiquement.

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Les chemins qui mènent vers les bonnes et les mauvaises écoles diffèrent sociologiquement et géographiquement. Les mauvaises écoles existent et la filière technique, qui leur est injustement assimilée, est sous-estimée. Le savoir est modélisé à l’école parce qu’il est abstrait: “On ne regarde pas un film, en cours, on l’“aborde”…” Le décret inscription est ici vu comme un catalogue Amazon, cruellement définitif, limitant les écoles disponibles aux choix posés antérieurement. Tout ça, on l’apprend (ou ré-apprend) avec humour, humeur et interactivité, durant l’heure et demie de spectacle (à voir au Vilar jusqu’au 19/12) qui semble ne durer qu’une cinquantaine de minutes… comme un bon cours, quoi. Des comédiens-conférenciers -titres qu’ils revendiquent- comme ça, on en redemande. On se réjouit de sortir d’un théâtre l’esprit plus clair sur un sujet essentiel. Bémol cependant: on aurait voulu connaître “leur” solution aux gouffres de l’enseignement. Mais ce n’est que du théâtre… Pas vrai?

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