Spaceman

Bernard Estardy et Francoise Hardy en 1968. © JULIE ESTARDY

Figure de l’ombre de la chanson, la pop et la variété françaises, Bernard Estardy (Johnny, Cloclo…) était aussi un grand bidouilleur de l’illustration sonore.

Vous ne connaissez sans doute pas son nom. Sa fille l’appelait « le géant » (le bonhomme mesurait quand même plus de deux mètres) mais dans le milieu de la variété française, Bernard Estardy était surnommé « le baron ». Né en septembre 1939, alors que la France est en train d’envahir l’Allemagne (ceci n’est pas une réécriture de l’Histoire), et décédé le 16 septembre 2006 aux manettes de sa console, Estardy est de quasiment toutes les discothèques. Il a été musicien de Nancy Sinatra et, avec son pote de lycée Nino Ferrer, de Nancy Holloway. Il a lancé Gérard Manset en lui permettant d’enregistrer ses deux premiers albums dans son studio feutré aux allures de saloon (le CBE et son logo à la forme de phallus). Il a participé à cinq disques de Michel Sardou, et même réalisé les arrangements d’ Alexandrie Alexandra et Magnolias for Ever pour Claude François.

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Bidouilleur génial, bricoleur de tubes, homme de démesure, sensible et excentrique, Estardy a traversé les décennies, les modes et les générations. Il a apposé sa griffe sur le Jerk de Thierry Hazard et le Big Bisou de Carlos. Il a bossé pour Johnny Hallyday et Sheila, Joe Dassin et Dalida, Herbert Léonard et Patricia Kaas, a prêté ses services à Marc Lavoine et Bibi, Pierre Bachelet et Francis Cabrel. Mais aussi François Hardy et Serge Gainsbourg, Lee Hazlewood et Bert Jansch…

Si le studio devint tellement prisé qu’il se mit à tourner 24 heures sur 24, Estardy trouva le temps d’enregistrer un disque d’instrumentaux et de chansons surréalistes ( La Formule du baron) mais aussi, entre 1970 et 1976, huit albums d’illustrations sonores pour le label Tele Music, spécialisé dans l’habillage de productions audiovisuelles. Sommes de fragments et d’idées éparses, électroniques et groovy, où il laissait libre cours à sa fertile imagination.

Alexis Le-Tan et Jean-Sebastien Bernard dit Jess avaient déjà signé deux compilations de Rare European Library Music, une autre consacrée à Jean-Pierre Decerf et une quatrième au studio Ganaro. Pour le cinquième volet (le troisième chez Born Bad) de la série Space Oddities dédiée aux compositeurs d’illustration sonore et par la même occasion quelque part à l’électro, au psychédélisme et au funk de l’ombre, le duo s’en est donc allé puiser dans les délires d’Estardy. Un type qui avait fait de son antre une salle de jeu et d’expérimentation. En résulte une collection de seize incongruités, barrées et truffées d’idées, menant d’une É meute à Tokyo à la Super Angoisse… Gonzai sortira en mai la compile Fragments d’une empreinte magnétique, composée de douze morceaux introuvables et inédits, et en août une biographie ( Le Géant) écrite à partir de souvenirs et de témoignages par sa fille Julie, qui a pris depuis 2006 la direction du studio.

Bernard Estardy

« Space Oddities (1970-1982) »

Distribué par Born Bad.

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