Insomnia

© CLARE SHILLAND

Produit par Micachu, le premier album de Tirzah déambule entre soul, électro et r’n’b sur des pépites pop, expérimentales et somnambules. Époustouflant.

Il y a des rencontres qu’on fait à l’école et qui vous changent une vie. Tazir Mastin a fait la connaissance de Mica Levi, plus connue dans le monde du rock sous le nom de Micachu, à treize ans alors qu’elles étudiaient respectivement la harpe et le violon à la Purcell School for Young Musicians, célèbre établissement scolaire dédié à la musique situé dans la banlieue londonienne. Depuis, les deux trentenaires ne se sont plus quittées. Levi est même devenue la productrice attitrée de Mastin. En 2013, le tandem s’était déjà distingué avec I’m Not Dancing, tube électro bricolo de dance music lo-fi repéré par le label Greco-Roman du Hot Chip Joe Goddard. Mais depuis, plus grand-chose. Juste deux EP’s et deux chansons ( Sun Down et Silly Games) sur l’album Adrian Thaws de Tricky. Native de l’Essex, diplômée du London College of Fashion, Tazir dans la vraie vie est jeune maman et designer dans une agence d’impression. Quand à l’âge de l’université, Levi s’est engagée à la Guildhall School of Music, Mastin s’est dirigée vers le monde de la mode mais en continuant de côtoyer sa pote. Que les dieux de la musique en soient loués.

Insomnia

Née à la fin des années 80, Tazir a grandi avec Lauryn Hill et les Destiny’s Child mais aussi Al Green, Barry White et D’Angelo… Tirzah, qu’elle considère comme sa collaboration avec Levi et non comme un projet solo, a le spectre bien plus large que ça. Tirzah fait dans la pop expérimentale, la voix soul et l’ambiance moderne mais dépouillée. Majoritairement enregistré dans son appartement et studio improvisé qu’elle partage avec des amis artistes dans le sud de Londres, Devotion est une petite pépite à l’équilibre fragile. Un disque de r’n’b aux pianos et aux microbeats répétitifs façonné par les arrangements explorateurs et la production décharnée de Levi (punk savante à qui l’on doit les bandes originales d’ Under the Skin et de Jackie).

Le tempo a ralenti mais les thèmes sont restés les mêmes: les rapports et les conflits humains. L’amour, la tristesse et la loyauté… Chez Tirzah, même l’autotune ( Guilty) ne fâche pas… Minimaliste, intime, faussement bancal, Devotion doit autant à ses limitations délibérées et intelligentes qu’à sa voix. Ce timbre troublant à la Martina Topley-Bird (tiens, une autre muse de Tricky) entre chant et spoken word qui sonne comme si vous l’écoutiez dans sa chambre planqué sous son lit.

Go Now a été écrit alors que les deux jeunes filles venaient de se rencontrer et explore les relations d’adultes à hauteur d’ados… La chanson qui donne son nom au disque repose sur quelques accords de piano et peut compter sur la contribution du rappeur Coby Sey, malade le jour de l’enregistrement. Soul sous xanax, néo-trip hop, électronique chloroformée, appelez ça comme vous voulez. Il se dégage de ces onze chansons une étrange et sensuelle sincérité. Pour sûr l’un des disques de l’été.

Tirzah

« Devotion »

Distribué par Domino.

8

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