Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

LE PERSONNAGE FÉTICHE DE PIETER DE POORTERE REVIENT DANS UNE COMPILATION MÊLANT DESSIN ROND ET HUMOUR NOIR, VÉRITABLE MARQUE DE FABRIQUE FLAMANDE.

Dickie dans l’espace

DE PIETER DE POORTERE, ÉDITIONS GLÉNAT, 56 PAGES.

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A l’image de la viande de porc ou des pierres précieuses, l’humour ado-adulte et volontiers un peu trash s’imposerait-il en Flandre comme l’un de ses principaux produits d’exportation vers le marché francophone? On peut en tout cas le penser, à voir la dernière sortie de l’ineffable Dickie chez Glénat, mais aussi d’autres publications dans d’autres maisons -désormais, à chaque éditeur francophone son Flamand drôle! Drôle mais surtout décalé et féroce, à l’image de ce dernier opus en date du personnage fétiche de Pieter De Poortere, connu chez nous depuis quinze ans sous le patronyme, effectivement intraduisible, de Boerke. Boerke, devenu Dickie, que son auteur envoie cette fois dans l’espace pour des planches de gags qui n’appartiennent qu’à lui: un graphisme simple, voire grossier et bien sûr faussement naïf -il suffit de regarder ses superbes pages de garde- et un personnage multifonction, le tout au service de gags en une planche toujours découpés de la même manière (un strict gaufrier de douze cases, dont une case-titre à chaque fois différente) où le caca côtoie certes la zoophilie, le suicide ou les obsessions sexuelles, mais qui au final en disent long sur les moeurs de notre belle planète, qu’elle soit vue de près ou de l’espace.

Sans interdits

Le Cowboy Henk de Herr Seele et Kamagurka, le Plunk! de Croomheecke et Letzer, Nix et ses Kinky & Cosy, mais aussi Otto de Frodo De Decker ou Jean-Norbert du Hollandais Mark Retera… L’humour flamand ou batave et volontiers irrévérencieux connaît depuis quelques années de jolis succès en français dans le texte -et ce même s’il n’y en a pas, de texte, à l’image des gags muets de Dickie. Il s’agit ici du quatrième album à paraître chez Glénat, après Le Petit Dickie illustré qui reprenait dix ans de planches, Le Prince Dickie ou le bien nommé Dickie, le fils d’Hitler, premier album de la série qui situait d’emblée le personnage et ses interdits: il n’en a aucun. Une liberté de ton et d’expression qui fait rire plus qu’elle ne choque, grâce à la bonhomie du trait et du personnage, et aussi grâce à un certain exotisme, volontiers absurde, qu’exhale l’humour flamand auprès des éditeurs francophones. Ainsi Dickie laisse-t-il cette fois parfois la place, le temps de quelques planches, à Dörk, son pendant extraterrestre à qui il ne manque que la moustache pour être son parfait sosie: ses « crop circles » ont la forme de bites, et s’il affronte mille dangers pour traverser l’espace et atteindre la terre, c’est, au choix, pour voler le corps de Jésus (avec les conséquences historiques que l’on sait), aller aux putes ou se faire accidentellement moissonner par… Dickie -qui d’autre?

OLIVIER VAN VAERENBERGH

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