Critique

Amélie Nothomb – Une vie entre deux eaux

© RTBF
Guy Verstraeten
Guy Verstraeten Journaliste télé

Dire qu’elle a une personnalité singulière tiendrait largement de l’euphémisme…

DOCUMENTAIRE DE LAURELINE AMANIEUX ET LUCA CHIARI. ***
Ce lundi 3 septembre à 22h00 sur La Une.

« Ce qui m’a fondé n’est pas le Japon, mais le manque du Japon. » Amélie Nothomb se livre de fond en comble dans ce film intime et rythmé, porté par une personnalité en tout point fascinante. Ou crispante, selon les points de vue. Il n’est, néanmoins, pas possible de lui être indifférent tant ses particularités, ses manies, ses bizarreries provoquent forcément la question: cette jeune femme (elle n’a que 40 ans) est-elle bien saine, mentalement? Elle l’est certainement trop. Ou pas du tout. Elle n’est que paradoxe en fait. Ici, Nothomb se raconte superbement dans un documentaire à la première personne, aussi pudique qu’impudique. Un paradoxe, encore…

Suivie lors de son retour au Japon par Laureline Amanieux et Luca Chiari, Amélie Nothomb parle de ses automatismes d’écriture -quatre heures par jour, systématiquement, dès 4 h du matin- et ses fêlures d’enfant, comme le viol qu’elle a subi à 12 ans, dans les eaux salées du Bangladesh: « C’est la dernière fois que je suis entrée dans la mer (…). C’est là qu’est né l’ennemi intérieur (…). Quand j’écris, l’ennemi intérieur trouve à qui parler. » Elle évoque son parcours, la Belgique, elle parle et parle encore, avec ce phrasé si particulier et ses grands chapeaux moches. C’est tout et n’importe quoi, un grand foutoir parfaitement maîtrisé, une mascarade géniale et une authenticité superficielle. Qu’en penser?

Le Japon dans lequel elle retourne deux décennies plus tard, auréolée du succès international qu’on lui connaît, n’est plus celui de sa naissance. Ni celui de ses 20 ans, quand elle se faisait humilier par l’intransigeante machine japonaise du travail en entreprise. Le tsunami et Fukushima sont passés par là, et pour l’écrivain, ce Japon en reconstruction est l’occasion d’un retour sur soi nécessaire et brûlant. Un ressourcement qu’Amélie Nothomb nous fait partager, dans la pure lignée des sentiments qu’elle peut animer: l’ambiguïté et la fascination.

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