Avignon : Le FUTUR PROCHE de Jan Martens, conjugaison amplifiée

FUTUR PROCHE choregraphie Jan Martens scenographie Joris Van Oosterwijk avec Zoe Ashe-Browne, Viktor Banka, Tiemen Bormans, Claudio Cangialosi, Morgana Cappellari, Brent Daneels, Matt Foley, Misako Kato, Nicola Leahey, Ester Perez, Taichi Sakai, Niharika Senapati, Paul Vickers, James Vu Anh Pham, Kirsten Wicklund et la participation de figurants et la claveciniste Goska Isphording lumiere Elke Verachtert , video Stijn Pauwels costumes Jan Martens, Els Mommaerts, Joris Van Oosterwijk © Christophe Raynaud de Lage

Le chorégraphe belge Jan Martens présentait ce 19 juillet son FUTUR PROCHE dans la Cour d’Honneur. Un pari audacieux, celui d’une pièce d’ampleur pour dix-sept danseurs et un clavecin, revue aux dimensions de l’écrin historique du Palais des Papes. Evocation.

Il a fallu une rencontre, comme un coup de foudre. Celle de Jan Martens et du clavecin, figure baroque, tombée dans l’oubli un temps, remise au goût du jour par des compositeurs modernes. Pour le chorégraphe, cette rencontre est à l’image de son travail : c’est à partir des marges qu’on doit faire bouger les choses. Sa première utilisation du clavecin, c’était avec any attempt will end in crushed bodies and shattered bones. Un spectacle créé-et ovationné- en 2021 au festival, chorégraphie pour danseurs de 17 à 70 ans, autour du concerto pour clavecin et cordes Op.40 d’Henry Gorecki, interrogeant l’immobilisme des Hommes face à un monde changeant, effrayant. L’artiste flamand a ensuite prolongé la découverte de l’instrument en investiguant la vie de la créatrice de l’œuvre, Elisabeth Chojnacka, avec ELISABETH GETS HER WAY. Sa recherche formelle autour d’un instrument qu’on classe largement au rang des oubliés a permis à l’artiste flamand d’en découvrir la richesse de création contemporaine. Par des œuvres et compositeurs modernes, bien sûr, mais aussi, surtout, par son son, si particulier. Métallique, quasi agressif par moment, ultra actuel. C’est dans ce sens que le clavecin revu par Jan Martens était à l’honneur en Cour d’Honneur.On le comprend immédiatement, lorsque, alors que le noir vient à peine de se faire sur les gradins, rentre en scène Goshka Isphording, interprète et ancienne élève de Elisabeth Chojnacka elle-même.  Elle s’installe sur le long banc de bois qui occupe le centre du plateau. Incontournable, elle tiendra la pièce entière du bout de ses doigts, du cœur de son énergie constante, alignant les œuvres contemporaines de Peteris Vasks, Anna S. Bordvaldsottir, Janco Verduin, Graciane Finzi et Aleksandra Gryka. Autour de ce banc de bois, créé à taille de Cour d’Honneur par Joris van Oosterwijk, quinze danseurs de l’Opera Ballet Vlaanderen et deux adolescentes, magnétiques, dynamiques, électriques. Un corps de ballet moderne, où chaque identité est essentielle, mise en lumière et en corps.

© Christophe Raynaud de Lage

Son, corps, voies

FUTUR PROCHE évoque la possibilité du changement, à l’heure du dérèglement climatique et du post-COVID. Scène pivot, un bain rituel dans une grande bassine d’eau amenée par les danseurs sur le plateau symbolise peut-être notre monde qui fuit, au propre comme au figuré. Autour du grand banc en bois, les danseurs évolueront durant une heure et demie. Précis, mécaniques, rythmiques. Pas un faux pas dans ce ballet réglé au millimètre près, qui parfois échappe à notre compréhension mais pas à notre attention. Lors d’une rencontre avec le chorégraphe, en amont des représentations avignonnaises, et après avoir assisté à un filage du spectacle, il nous avait confié que le spectacle pouvait encore bouger. Nous avions assisté à une succession heureuse d’une heure de scènes diverses, épurées, emportées. L’ouverture se faisait en parade quasi amoureuse, duo de danseurs. La scène de la baignade arrivait en fin de spectacle. Un moment d’intimité corporelle capté par vidéo se projetait quasi maladroitement, sensiblement, miroir de nos internets dévoilants. Ici, ce moment est immense, à l’image de la Cour, et la vidéo des danseurs est projetées en mur de fond, amplifiant une intimité qui s’en retrouve, bien qu’hyper esthétisée et superbement impressionnante, légèrement amoindrie. Une autre scène encore, qui avait capté notre attention, pliés très classiques qui progressivement deviennent comme fous, se perd légèrement dans le reste de la pièce. Jan Martens avait juré que tout pouvait changer. Tout a changé. Et FUTUR PROCHE devra se plier encore aux plateaux sur lesquels il entamera sa tournée. Chez nous, ce sera dès cet automne. Nous y reviendrons dans nos pages,  dans un futur proche, définitivement mouvant. Mais finalement passionnant.

© Christophe Raynaud de Lage

Dates de tournée :

Du 23 septembre au 01 octobre, DE SINGEL (Anvers)

Du 18 au 26 novembre, Vlaamse Opera Gent (Gand)

Le 21 avril 2023, Cultuurhuis de Warande (Turnhout)

Le 10 mai 2023, Concertgebouw, Brugge

Et aussi à Amsterdam, La Haye, Paris

Toutes les dates et informations :  www.operaballet.be 

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