Dour Festival : le baromètre du vendredi

Laurent Hoebrechts Journaliste musique
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Pas mal de hip-hop et une programmation un peu plus guitarisée ce vendredi. On a choisi quelques concerts à vous décrypter en quelques mots.

Le plus pop : Disiz

Plus de 20 ans après ses débuts, et un parcours en dents de scie, Disiz est toujours là. Mieux : avec son album L’amour, sorti en mars, il est en train de réussir l’un des plus beaux coups de sa carrière. Carton du moment, il est le principal prétexte d’une tournée qui voit le (de moins en moins) rappeur accompagné d’un vrai band – clavier, batterie, basse, guitare. Disiz passe de la pop à la chaloupe afro (Weekend Lover), de la chanson à la dance (Splash), en intégrant parfois quasi le tout dans un seul morceau – Rencontre et son refrain, devenu hymne de l’été. On appelle ça de la variété. Et c’est définitivement ce qui pouvait arriver de mieux à Disiz.

© Olivier Donnet

Le plus punchy : Dinos

En 2019, Dinos livrait un concert mémorable sur la scène de Dour. A l’époque, il est encore ce rappeur du « subtop », cherchant à transformer sa plume street en un vrai succès. Trois ans plus tard, après avoir continué à semer régulièrement, Dinos peut récolter les fruits de son travail. Dans la Boombox, et malgré un son problématique, il a donné un set imparable, à la fois tendu et rassembleur, alignant ses « hits », et terminant quasi en hurlant au bord de la fosse. Victoire aux points.

© Olivier Donnet

Le plus généreux : Zamdane

« Tout ce qu’il voulait, c’est changer sa vie », chante Zamdane en ouverture de son premier album, Couleur de ma peine, sorti au printemps. Une phrase  qui fait forcément écho avec l’histoire de celui qui est arrivé seul du Maroc en France, à l’âge de 17 ans. De ce parcours, il en a fait le fil rouge d’un rap hyper mélodieux, qui réussit à éviter le pathos. Sur scène, Zamdane transforme d’ailleurs son récit en une grande fête. L’exercice live a beau être nouveau pour l’intéressé, il a livré à Dour un concert à la fois touchant et rassembleur. Loin des show calibrés, Zamdane se laisse déborder, dépassant même légèrement de l’horaire. Devant quitter précipitamment la scène, il reviendra même quelques minutes plus tard, parce que « je ne vous avais pas remercié correctement », point final d’un concert dont la générosité a donné envie de réécouter l’album. Toujours un bon signe.

Le plus…tôt : Commander Spoon

Pas toujours évident d’ouvrir la journée. Même si ces journées, le festival les commence de plus en plus tard. 15h30 pour le premier concert (14.30 samedi et dimanche). Il y a toujours un tas de gens à Dour pour qui chaque début d’après-midi est un fameux lendemain de veille. Mais les jazzmen bruxellois de Commander Spoon ont bien géré l’affaire. Pétris qu’ils sont de talent et d’influences. Spoon man…

© Olivier Donnet

Le plus voyageur : Nubya Garcia

A Dour, il ne faut pas nécessairement aller au dub corner ou inhaler des grandes bouffées du bon air ambiant pour avoir des envies de Jamaïque. On pouvait aussi par exemple en nourrir devant la géniale et voyageuse musique de la saxophoniste londonienne Nubya Garcia. Entourée d’un claviériste, d’un contrebassiste et d’un batteur, la native de Camden Town a bluffé tout son monde.. Un concert qui avait les vibes, donnait des envies de vacances et pouvait compter sur les talents de Joe Armon-Jones…

© Olivier Donnet

Le plus jusqu’au-boutiste : Squarepusher

Thomas Jenkinson, alias Squarepusher, a souvent dénoncé le professionnalisme qui engloutit toute forme d’expérimentation et le conservatisme qui peut régner au sein de la musique électronique. Sonorités analogiques versus culture rave de l’Essex. A 47 ans, l’homme qui faisait jouer des robots est toujours aussi indispensable et radical. Le maestro de l’Intelligent Dance Music a sorti sa basse, ses beats et son mur de loupiotes pour un set dystopique qui tabasse. Extrêmement efficace.

Le plus fou : Bothlane

Projet solo du batteur liégeois Alain Deval, croisé avec The Brums, Ginger Bamboo ou encore aux côtés de la Finlandaise Anu Junnonen, Bothlane est un one-man-band alien qui allie la batterie au synthé modulaire. Puise son inspiration dans la techno et le jazz. Bothlane (qui signifie folie en langue bantoue) a mis Dour en danse et en transe. Secoué le Labo, un petit chapiteau haut de plafond. Le Rémy Bricka des clubbeurs… 

© Olivier Donnet

Le plus électrique : The Haunted Youth

Signé sur le jeune label Mayway Records à qui l’on doit notamment la découverte de l’époustouflante folkeuse gantoise Meskerem Mees, The Haunted Youth est un groupe d’Hasselt construit autour du Limbourgeois de 28 ans Joachim Liebens. Un peu Tame Impala, un peu MGMT. Un peu DIIV un peu Slowdive. Un groupe à guitares comme il n’y en a pas des tonnes avant dimanche. Et un single, Teen Rebel, que Stu Bru passera encore dans 20 ans.

Le plus franco-belge : Nikitch et Kuna Maze

C’est l’histoire belge de deux Français qui se sont rencontrés au Conservatoire de Chambéry et ne se sont plus jamais quittés. Jusqu’à s’installer tous les deux dans la capitale de l’Europe. Signés sur le label de Brighton Tru Thoughts, Nicolas Morant (Nikitch) et Edouard Gilbert (Kuna Maze) ont fait mouche à la croisée du jazz, du hip hop, des musiques électroniques mais toujours bien campés sur le sol parfois glissant du dancefloor. Même ceux qui étaient là en touriste se sont laissés embarquer. Leur nouvel album Back & Forth est sorti le 27 mai.

Le plus poli : Youssef Swatt’s

Un morceau nourri par ses fans (Miroir), une reprise de Disiz (l’un de ses héros)… Il a remercié tout le monde, vraiment tout le monde, le rappeur tournaisien. Pour le coup pas loin d’être dans son jardin. Il s’est surtout déplacé à Dour avec un full band. Des musiciens aussi contents que lui d’être là. Ca donne tout de suite moins une impression de karaoké géant.

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