écrivain

Lancé avec son fabuleux bouquin Les fourmis, Bernard Werber ne cesse d’accroître son public en le faisant à la fois rêver et réfléchir. Son univers est fait de « tout ce qui ne se voit pas ». Mais aussi de ces choses bien tangibles qui font basculer le monde. La force de ce « grand gosse » au charme apparemment nonchalant et aux airs rêveurs, est tant dans la construction de ses récits que dans sa manière passionnée d’écrire. Avec lui, on voyage dans les étoiles, on part à l’aventure… Bilan d’une année bousculée. Comme les autres!

Quels sont les événements qui vous ont le plus marqué cette année?

L’élection d’Obama, qui annonce une nouvelle donne géopolitique, et la crise financière. Mais on la voyait venir! Aussi les Jeux olympiques chinois. C’est la bascule de la puissance américano-occidentale à la Chine qui a montré qu’elle arrive à faire ce qu’elle veut en n’ayant de compte à rendre à personne. Suite à la crise financière, on s’est aperçu que même les Chinois sont touchés. La Chine devient une puissance industrielle et financière incontournable et elle ne joue pas le même jeu que les occidentaux, puisqu’il n’y a pas d’opposition ni d’écologistes. En Afrique où elle a envoyé des armes, au Zimbabwé, en Birmanie ou en Corée du Nord, la Chine a sa propre politique étrangère qui va forcément à un moment ou un autre, entrer en conflit avec la politique de l’occident. Avec 1,3 milliard de personnes et un système politique centralisé non démocratique, sa marge de man£uvre et son poids sont plus larges que ceux des occidentaux.

Quel est votre avis sur l’affaire de l’accélérateur de particules inauguré en septembre dans le sud de la France et tombé aussitôt en panne?

Moi ça me plaît beaucoup cette expérience. J’en parle dans une de mes nouvelles Le maître du cinéma qui fait partie de mon recueil Paradis sur mesure (Albin Michel). Cette machine est formidable, car l’infiniment petit est essentiel à la compréhension de l’univers. Le fait que ça ne marche pas est normal, comme toutes les nouvelles machines, toujours difficiles à régler. Mais je ne crois pas que ça va créer un trou dans l’espace-temps.

Que pensez-vous de l’interdiction de fumer dans les restos, les bars et les boîtes de nuit?

J’étais étonné que la bataille soit ga-gnée aussi facilement par les non-fumeurs. J’ai pensé que les lobbys du tabac en France et aux Etats-Unis avaient des moyens de pression sur les gouvernements. Personnellement, vu que j’écris au café, ça me permet de rester plus longtemps, puisque je ne suis pas fumeur.

Le 26 février a eu lieu la journée mondiale de mobilisation et d’action à l’appel du forum social mondial. Le mot d’ordre: un autre monde est possible…

Tout le travail du romancier est d’imaginer cet autre monde, afin que d’autres gens puissent le bâtir. Mais il faudrait d’abord définir ce qui est meilleur.

Un mot sur la grève des scénaristes aux Etats-Unis?

Les médias sont en pleine révolution et toutes les règles de répartition des droits sont à revoir puisqu’il y a de nouveaux moyens de diffuser des films, comme le téléphone et l’ordinateur.

Ton avis sur les tensions communautaires en Belgique, menaçant l’avenir du pays.

C’est étonnant que le pays censé représenter l’union de l’Europe n’arrive pas à faire sa propre union interne! Il faudrait revoir toute la constitution belge en vue d’établir un système plus simple et plus clair, qui permette d’avoir une politique cohérente. On dirait que tout le monde se gère mutuellement. Le pays n’est pas dans la construction, mais dans l’obstruction.

Te sens-tu concerné par la conférence sur le climat en Pologne?

A mon avis, il va être nécessaire de faire un gouvernement mondial planétaire. Pour 3 raisons: 1/ L’écologie: ça ne sert à rien qu’un pays ait un comportement écolo si le voisin se met à polluer; inutile que l’Occident vote quoi que ce soit si la Chine pollue. Il faut surveiller les centrales nucléaires. 2/ La crise financière: tant qu’il y aura des paradis fiscaux, des gens détourneront de l’argent pour le mettre dans ces paradis-là. 3/ L’accroissement de la démographie: quand nous serons 10 milliards, on va tout détruire. Il faut stabiliser l’explosion démographique et faire un contrôle des naissances au niveau de toute l’humanité.

Le livre qui t’a le plus marqué cette année?

Millénium m’a marqué pour sa réussite qui m’a interpellé. Pour moi, c’est un polar qui ressemble à des tas d’autres. Son succès est dû à la communication qui a été faite autour et qui a pris plus d’importance que le produit lui-même.

Le film que tu retiendrais?

Idiocratie, d’après un scénario d’Ethan Coen. Ça raconte que l’avenir de l’humanité est la bêtise. Il n’a pas été distribué et on ne le trouve qu’en Belgique, en dvd.

Tes parutions en 2008?

Paradis sur mesure, un recueil de nouvelles.

Tes projets pour 2009?

Un projet de film avec les Belges. Le 1er avril, la sortie de mon Encyclopédie du savoir relatif et absolu (2ème volume) et le 1er octobre, un thriller psychologique.

Et dans l’immédiat, que comptes-tu faire?

Partir en vacances à l’étranger.

Dans le couloir, des peintures de lui, à son image. Etranges, ludiques, surréalistes. Où les mots contredisent l’image. Un peu comme la pipe de Magritte. Un peu comme lui? Bernard Werber est une boîte à Pandore… pleine de secrets.

entretien Nadine Monfils

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