Un merveilleux souvenir ****

© National

Marc Pautrel consigne dans son nouveau manuscrit une tragique histoire de famille. Jugé impubliable sans s’exposer à un procès, son éditeur Philippe Sollers l’exhorte “à dire autrement”. Soit le court texte que le lecteur découvre palpitant entre ses mains. Nichée au cœur de la confession sur la façon dont Pautrel, “comptable du monde”, endosse le sacerdoce du métier d’écrire, la question sur laquelle vacille l’ouvrage se révèle éminemment actuelle. À l’heure où le pur commerce muselle les formes artistiques, où la cancel culture se pique de repasser les plis du patrimoine, proclame des couvre-feux de la mémoire, quid de la légitimité de tout dire, fût-ce avec la plus grande justesse? Nous n’ébruiterons pas le cœur même de la tragédie qui fait éclore le livre, bouleversant origami intime autour de la sœur et des grands-parents. Juste dire -dire juste?- que parmi les nombreux ouvrages évoquant le confinement sanitaire (“moyenâgeux et stupide”), celui-ci nous a explosé à la figure avec une force mystérieuse. Par son côté à la fois “méta” et mise à nu, alliage précieux de la forme et du fond, ce court récit sur le non-dit incise sur l’os et le fil de l’émotion la plus brute. Il serait cruel que son intelligence émotionnelle se noie dans une solitude absolue. Lisez!

De Marc Pautrel, éditions Gallimard/L’Infini, 88 pages.

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