Critique

[à la télé cette semaine] Cycle Luis Buñuel

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Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Un classique absolu du surréalisme à l’écran (Le Charme discret de la bourgeoisie, ce lundi 27 septembre à 22h35), une plongée vénéneuse dans la jungle (La Mort en ce jardin), un huis clos fantastique étouffant (L’Ange exterminateur) et un film d’animation évoquant un épisode de sa vie (Buñuel après l’âge d’or): le cycle consacré par Arte à Luis Buñuel ne manque pas d’allure.

Le grand cinéaste espagnol naturalisé mexicain et très actif en France reste une des figures les plus singulières du 7e art. On est marqué par son esprit de subversion permanent, le souffle surréaliste de son oeuvre, son aptitude à conjuguer réalisme et onirisme, son humour et son goût d’un érotisme décalé, son caractère imprévisible et rebelle à toute récupération. D’Un chien andalou (1929) et L’Âge d’or (1930) à Cet obscur objet du désir (1977) en passant par Los Olvidados, La Vie criminelle d’Archibald de la Cruz, Viridiana, Le Journal d’une femme de chambre et Belle de jour, l’oeuvre du natif d’Aragon ne cessa de fasciner, de choquer, de dynamiter les conventions, d’assumer une liberté farouche.

Les classes possédantes furent sa cible récurrente, comme dans L’Ange exterminateur (1962), où les convives d’une réception luxueuse se retrouvent mystérieusement empêchés de quitter la maison, le vernis de la civilisation s’y retrouvant vite abîmé. Comme aussi dans Le Charme discret de la bourgeoisie (1972), où trois notables et leurs compagnes voient leur projet de dîner ensemble sans cesse reporté par des circonstances contraires. Dislocation des certitudes sociales, comédie du pouvoir poussée à l’absurde: le regard critique de Buñuel et son humour ravageur font merveille dans ces deux grands films que leurs thèmes rapprochent même si leur forme diffère énormément. La Mort en ce jardin (1956) emmène une distribution de comédiens français (Simone Signoret, Georges Marchal, Michel Piccoli, Charles Vanel) dans l’enfer d’une jungle d’Amérique latine où gronde la révolte de prospecteurs d’or spoliés par l’État et un potentat local. Ce film éminemment vénéneux et peu programmé mérite d’être redécouvert. La proposition la plus récente et surprenante du cycle est Buñuel après l’âge d’or, un film d’animation réalisé en 2018 par Salvador Simó et prenant Buñuel pour personnage principal d’une évocation saisissante du tournage de son documentaire Terre sans pain dans la très pauvre région espagnole de l’Estrémadure en 1932. Un complément idéal pour un programme à ne pas manquer.

À partir du lundi 27/9, Arte. ****(*)

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