CLARE LOUISE, LA PLUS FRANÇAISE DES FOLKEUSES BRUXELLOISES, LAISSE S’ENVOLER BALLOONS. UN DEUXIÈME ALBUM AUX CHARMES AÉRIENS.

Avec sa structure en bois et ses énormes fenêtres qui lui servent de façade, le Pitch-Pin, place Flagey, a la gueule de ses voisins le Belga et L’Epaulé jeté mais sans le côté branchouille et petzouille qui va avec. C’est dans ce troquet populaire où on peut roupiller sur les banquettes et boire des bières au petit déjeuner que Claire Girardeau, alias Clare Louise, a choisi de tailler la causette. La Française d’Avranches (Basse Normandie) arrivée à Bruxelles via la Bretagne sort avec Balloons un ravissant deuxième album. Aérien et mélancolique. « La création chez moi est toujours en mouvement. J’écris des chansons sans savoir où elles finiront, raconte la souriante folkeuse souvent comparée à Joni Mitchell. Après Bare Tales, un EP très minimaliste, guitare-chant, je voulais quelque chose de plus étoffé, de plus collectif. »

Dans la tête bien remplie de Claire, a très tôt trotté le nom et le son de Boris Gronemberger. Un musicien à qui elle a confié la direction artistique de son disque et qu’il serait fort réducteur de présenter comme le batteur des Girls in Hawaii. « On s’est souvent rencontrés à des concerts et dans des bars sans vraiment se connaître. Et j’ai toujours beaucoup aimé son projet V.O. Alors quand je me suis demandé avec qui travailler, c’est tout de suite à Boris que j’ai pensé. J’ai toujours trouvé qu’il insufflait des idées incroyables à ses albums. Qu’il proposait une vraie richesse dans les arrangements. Je voulais qu’il apporte cette touche-là à mes morceaux. Qu’il entende ce que moi je n’entends pas dans mes chansons. Et puis qu’on ficelle tout ça ensemble. Il a en quelque sorte joué un rôle de chef d’orchestre. Mais tout restait discutable. Chacun a d’ailleurs apporté sa graine. »

Enregistré avec Géraldine Capart (Miossec, Dominique A…) dans le local des Girls où Clare et ses amis se sont enfermés pendant quinze jours, Balloons est un disque de rupture. De séparation. « Dans mes chansons, je parle beaucoup de mon histoire, de mes sentiments, de ce qui m’arrive… De choses personnelles et subjectives. J’ai toujours eu l’impression qu’il y avait quelque chose de thérapeutique, de cathartique dans l’écriture. Coucher sur papier ce qu’on ressent, c’est à un moment lâcher quelque chose qui est un peu trop lourd pour soi. Après, je ne m’en dépossède pas mais je m’en détache. Ce n’est pas mon intimité avec un grand i, ma douleur que j’expose. Il n’y a pas forcément d’impudeur dans tout ça. »

Un oiseau avec des jambes

Ces derniers temps -elle pense aux CD à côté de sa chaîne-, Claire a pas mal écouté Yo La Tengo, Angel Olsen, le dernier Bill Callahan. Beaucoup de Tindersticks aussi. Du folk mais pas que. « Le folk peut être un point de départ vers d’autres univers. Je l’ai longtemps abordé comme une puriste. Résumé à une guitare acoustique et une voix qu’on va chercher loin. Mais ma vision a évolué avec tout ce que j’ai pu écouter. Il est possible de le mélanger à un tas de choses. On n’est pas obligé de rester enfermé dans un carcan. Le folk peut prendre différents visages. Se mêler à des sonorités plus électriques ou électroniques. »

Autant on pouvait entendre l’influence de la musique irlandaise sur son premier album, Castles in the Air, autant Clare Louise s’en est détachée ici. Une phase de son parcours musical, dit-elle. « Balloons est l’un des titres phares de l’album. Ce n’est pas nécessairement mon préféré mais il reflète la thématique du disque. Ce que je voulais transmettre. La recherche d’une certaine légèreté après tant de lourdeur et de noirceur. Quelque chose de coloré, d’enfantin, d’aérien, d’insouciant… Ces ballons, qui renvoient à l’enfance, à quelque chose de joyeux, représentent une forme d’espoir. Je me suis rappelée avoir participé, petite, à un lâcher de ballons. J’avais écrit un message. Je n’avais pas trouvé d’interlocuteur mais je trouvais super de lui permettre de s’envoler sans savoir ce qui lui arriverait. L’idée de laisser les choses partir au hasard. »

La pochette est signée Fanny Dreyer. Une Bruxelloise d’origine suisse qui bosse souvent dans l’illustration de bouquins pour la jeunesse. « J’ai découvert ce qu’elle faisait via Facebook et on s’est vues pour la première fois à un concert de Castus à la Tricoterie. Les paroles « I Hit the Ground I Touch the Sun » et le choix entre rester sur terre ou s’envoler l’ont inspirée. Elle est partie dans cette idée d’oiseaux cloués au sol. L’un d’eux a même des jambes. J’ai flashé. »

Tout doucement, Claire, qui travaille au Service des musiques non classiques de la Communauté française, section jazz -« Des gens me disent: « C’est confus. Et quoi, tu t’octroies des subsides? » »-, va chercher à s’exporter. S’exporter dans son propre pays.

« Je n’ai pas eu beaucoup d’ouverture sur la France avec les disques précédents. Ils ont juste été diffusés dans le réseau familial mais je n’ai pas une si grande famille que ça… On n’avait ni relais, ni booking, ni presse, ni distribution. C’est compliqué sur un territoire qui possède déjà une telle offre.  »

Balloons sortira outre-Quiévrain en avril, distribué par La Baleine. Une date parisienne est par ailleurs déjà annoncée le 26 février avec Françoiz Breut au Nouveau Casino. La suite? « Je suis assez branchée synthé ces derniers temps. C’est une découverte de cette année. Je me suis acheté un clavier midi. Je commence à essayer de me servir d’Ableton. Je ne sais pas comment ça m’est venu. Je regardais des vidéos d’Au Revoir Simone et je trouvais vraiment cool ce son vintage. Pour l’instant, je bidouille. Rien de sérieux. Je ne vais pas m’avancer mais c’est une direction que j’aimerais donner à mes prochains morceaux. » To be continued…

BALLOONS, DISTRIBUÉ PAR CARAMEL BEURRE SALÉ/PIAS.

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LE 13/03 À LA ROTONDE (BOTANIQUE).

RENCONTRE Julien Broquet

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