Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

LA GALERIE DANIEL TEMPLON ACCUEILLE NORBERT BISKY POUR SA PREMIÈRE EXPO SOLO À BRUXELLES. UN ACCROCHAGE PLACÉ SOUS LE SIGNE DE LA CROYANCE ET DU CONFLIT.

Hérésie

NORBERT BISKY, GALERIE DANIEL TEMPLON, 13A, RUE VEYDT, À 1000 BRUXELLES. JUSQU’AU 31/12.

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Etonnant parcours que celui de Norbert Bisky, artiste allemand né en 1970 à Leipzig. Son travail condense une série d’influences qui déroutent. On retrouve chez lui tant la marque des deux grands maîtres de la peinture qui furent les siens, à savoir Georg Baselitz et Jim Dine, que l’influence d’une peinture figurative de type réaliste socialiste -celle qu’il a côtoyée durant son enfance-, ou encore, une propension à l’abstraction. Pour sa dernière exposition, cette trame esthétique s’est complexifiée davantage en raison d’une mise en situation particulière. Bisky explique: « Cette nouvelle série prend sa source dans un échange d’atelier qui a eu lieu début 2015. Pendant trois mois, j’ai fait l’expérience d’une résidence artistique à Tel-Aviv. Cette parenthèse a eu un effet puissant sur mon travail. Alors que je m’apprêtais à faire de l’abstraction, la veine dans laquelle j’évolue en ce moment, ce séjour m’a ramené sur le chemin de la figuration. Etre en Israël, pays où se cristallisent de nombreuses tensions du monde moderne, m’a confronté au réel avec une telle intensité qu’il était impossible de l’éviter. » Faut-il craindre la peinture à message simplifié? Pas du tout, Norbert Bisky ne sacrifie pas aux raccourcis: « Conflit de valeurs ou de civilisation, je préfère m’en tenir au rôle de miroir. Je reflète la situation, je la mets en scène mais il ne me viendrait pas à l’idée de trancher, de dire où se situent le bien et le mal. Je préfère restituer le contexte plus large qui est celui d’un système de croyances généralisé… Je dis bien « généralisé », car lorsque l’on n’est pas religieux, on a tendance à oublier que même l’hédonisme est une croyance. »

Explosion visuelle

C’est avec la puissance d’une déflagration que le travail de l’Allemand explose au visage du visiteur qui pénètre dans la galerie Templon. Grands formats chatoyants, aplats de couleurs, tableaux verticaux plus petits, collages à base de matériaux recyclés, ready-made, installations réalisées in situ qu’elles soient suspendues, rampantes ou grimpantes, mais également objets décalés nécessitant d’ouvrir l’oeil aux quatre coins de la galerie… Hérésie part à l’assaut de l’espace, donne le vertige, transpose sous d’autres latitudes. L’imagerie déployée interpelle: mosquées brisées, tour de Babel, lanceurs de pierres, ruines, scènes de fin de monde, errance des migrants… Les conflits sont là qui donnent leurs architectures et leur beauté aux toiles. Le tout, sur fond bleu imprégné de paysages éclatés, traversé d’une incroyable énergie qui en désamorce la moindre tentative de céder à une lecture politique manichéenne des faits présentés. Tout est complexe, semble dire Bisky, comme dans cette installation où des plans de pays en 3D sont liés les uns aux autres par une longue chaîne reposant sur un subtil équilibre. Il en va de même pour un portrait comme Rough Trade, dont la trame est rehaussée de sacs de toile destinés au transport de fonds, et qui synthétise le caractère percutant des compositions de Bisky, quelque part entre figuration et abstraction.

WWW.DANIELTEMPLON.COM

MICHEL VERLINDEN

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