UNE STAR BELGE DANS UN GENRE TYPIQUEMENT ANGLAIS, LA DRUM’N’BASS: AVEC SON NOUVEL ALBUM 2, L’ANVERSOIS BORIS DAENEN CONTINUE SON IRRÉSISTIBLE MARCHE EN AVANT.

On rencontre Boris Daenen dans une librairie-restaurant du sud-est de Bruxelles. Rayon livres de voyage. Forcément. Ces derniers mois, le jeune homme mieux connu sous le pseudo de Netsky a fameusement bourlingué. L’an dernier, il fêtait encore le passage à 2011 en Nouvelle-Zélande et récemment, il avoue avoir eu un gros coup de c£ur pour l’Afrique du Sud. « J’y suis passé en mars. Cela m’a donné envie d’y habiter pendant quelques mois. C’est une toute autre vie, là-bas. Une ville comme le Cap est très arty, la bouffe est géniale. Puis il y a le soleil, des pingouins sur la plage… C’est une atmosphère assez incroyable pour se détendre et écrire de la musique. » Cela doit en effet changer d’Eregem, 20 000 habitants dans la banlieue d’Anvers. C’est là que vit habituellement Boris Daenen, jeune prodige de la drum’n’bass made in Belgium, âgé d’à peine 23 ans. Encore inconnu il y a deux ans d’ici, Netsky est aujourd’hui un poids lourd du genre. Fin mai, il remplissait notamment par deux fois l’Ancienne Belgique -et cela, alors que son nouvel album, sobrement intitulé 2, ne sort que ces jours-ci…

Ray Charles sous speed

Il y a une énigme Netsky. Comment un jeune Anversois a-t-il réussi à se hisser si vite au sommet d’un genre so british? Née dans les années 90, la drum’n’bass est en effet intimement liée à l’environnement urbain anglais, plus encore à Londres même. Mélangeant fulgurances jungle, racines hip hop et vibrations reggae, elle fut la soundtrack hyperspeedée des clubs londoniens avant d’être supplantée par le dubstep. Le style a pourtant encore ses adeptes et connaît même un regain de popularité. Boris Daenen s’est lui chopé le virus à l’adolescence. Voix grave contrastant étonnamment avec son visage d’Apollon encore poupon, il explique: « C’était une manière de prolonger ma passion pour le reggae, que j’écoutais beaucoup à l’époque. J’allais à des festivals, genre Reggae Sundance, ou j’allais voir Eek-A-Mouse au Petrol… Je joue aussi de la batterie, depuis l’âge de 8 ans, et j’aimais bien les rythmes rapides, le son des basses du dancehall, des sound-systems. Combiné avec mon amour pour la soul, je suis venu assez naturellement à la d’n’b. »

Un moment en particulier provoque le déclic. « Je devais avoir 16 ans. Je suis allé à une fête clandestine à Anvers. Un truc un peu underground, 300 personnes à l’intérieur pas plus. Quand je suis arrivé, ils ont joué un remix du Gold Digger de Kanye West par High Contrast. A l’époque, tous les clubs jouaient ce morceau. Mais là tout d’un coup, le tempo s’accélérait. Cela a changé ma perception de la d’n’b. Je découvrais que cela pouvait être une musique pleine de soul, qui pouvait partir d’un sample de Ray Charles, et en même temps proposer une énergie différente. » L’intéressé commence donc à creuser le style, s’enfermant dans sa chambre devant son ordinateur. « C’est marrant, j’ai toujours eu pas mal de problèmes de concentration à l’école. Je n’arrivais jamais à être attentif très longtemps. Par contre dès que je me mettais à la musique, je pouvais passer des journées entières, sans boire ni manger. Cela a toujours étonné ma mère… (sourire) « 

London calling

Petit à petit, la sauce commence à prendre. L’intéressé se pique même d’envoyer des démos aux principaux labels d’n’b, dont la maison-mère, l’enseigne qui a posé quelques-unes des bases du genre: Hospital Records. « Quand j’ai commencé la d’n’b, cela a toujours été mon label favori, celui qui reflétait le mieux mes goûts. Le côté musical n’y était pas sacrifié au seul profit de l’énergie. Tony Coleman, par exemple, est mon patron, il a été un des premiers du genre à faire du live: c’était du pur jazz, mélangé à du funk, rien d’autre! J’ai donc commencé à envoyer des mails. Finalement, ils m’ont rappelé. Ils m’ont proposé un deal pour trois albums. J’ai signé sans réfléchir. Cela n’était peut-être pas très malin, mais c’était un rêve pour moi. A l’époque, je n’avais pas de management, c’était juste moi en train de faire de la musique dans ma chambre. »

Restait à concrétiser l’essai. Après une série de maxis, un premier album sort en 2010 qui vaut à Netsky de remporter le prix de « Meilleur nouveau producteur » aux prestigieux Drum’n’Bass Arena Awards, décernés chaque année à Londres. « J’ai une relation spéciale avec cette ville. J’adore y être, y faire la fête, mais je suis aussi content de rentrer. La vie nocturne, comme la vie en général, y est plus rude. Quand je vois les étudiants, à quel point ils peuvent se soûler à mort, la consommation de drogues aussi… Eregem, forcément, c’est plus tranquille (sourire )… Puis me retrouver coincé dans le métro entre douze businessmen, ne croiser personne que tu connais dans la rue, ce n’est pas trop pour moi… »

En attendant, la formule de Netsky fonctionne. Simple mais efficace, proche du liquid funk, branche plus chaude et mélodique de la d’n’b. « A la maison, mon père m’a toujours fait écouter pas mal de jazz, de funk et de soul, la musique de Motown… Je pense vraiment que la musique black des années 70 a influencé ma production. J’ai pas mal samplé Marvin Gaye, par exemple… Du coup, la drum’n’bass pour moi, c’est les basses, pas mal d’énergie, de vitesse, mais combinées avec un côté soul, un peu de reggae. C’est en tout cas ce que j’essaye d’amener. » C’est encore vrai sur 2, nouvel album sorti ces jours-ci, qui évite de se prendre la tête pour suivre la règle du « toujours plus »: plus de puissance, plus de couleurs, plus de voix, plus de tubes… Netsky a d’ailleurs prévu une déclinaison live, accompagné d’un groupe. Le virus Netsky n’a pas fini de se propager…

NETSKY, 2, DISTRIBUÉ PAR HOSPITAL/NEWS. EN CONCERT LE 16/08, AU PUKKELPOP, HASSELT.

RENCONTRE LAURENT HOEBRECHTS

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