POUR SON QUATRIÈME LONG MÉTRAGE EN TANT QUE RÉALISATEUR, GUILLAUME CANET A FRANCHI L’ATLANTIQUE, SIGNANT, AVEC BLOOD TIES, UN POLAR DANS LA TRADITION DU CINÉMA AMÉRICAIN DES ANNÉES 70.

A l’image de nombreux cinéphiles, Guillaume Canet a, de toute évidence, biberonné au cinéma américain des années 70. Voir Blood Ties, c’est comme se projeter dans un autre espace-temps, ressemblant au New York des films de Lumet ou Friedkin, ressuscité le temps d’un polar « vintage ». Ce rêve américain, Canet raconte avoir commencé à le nourrir au lendemain de la sortie aux USA de Ne le dis à personne, son second long métrage comme réalisateur. Le succès aidant, les studios lui font les yeux doux, à quoi il aura la sagesse de préférer un projet personnel. Et de se lancer, après de fort dispensables Petits mouchoirs, dans la relecture des Liens du sang, film de Jacques Maillot dont il signe aujourd’hui le remake.

Max de crédibilité

Si la clé de la réussite est de savoir bien s’entourer, Canet a veillé à ne rien laisser au hasard, s’assurant la contribution d’un partenaire d’écriture de luxe en la personne de James Gray. On ne présente plus le réalisateur américain, auteur, avec Little Odessa, The Yards et We Own the Night d’une trilogie new-yorkaise faisant autorité, et gage, en la circonstance, d’un max de crédibilité. « Un jour, mon agent m’a appelé pour me dire que James avait vu Ne le dis à personne et qu’il souhaitait me rencontrer. Le courant est bien passé, et deux mois plus tard, nous nous sommes revus ici, à Cannes, où il faisait partie du jury. J’avais commencé à travailler à l’adaptation des Liens du sang, et j’en étais au stade où j’avais besoin d’aide pour la traduction anglaise, mais aussi pour adapter le scénario à la société américaine. Lorsque je lui ai demandé s’il connaissait quelqu’un, James m’a proposé ses services… »

De l’apport de James Gray, Guillaume Canet précise encore qu’il s’est surtout situé au niveau de la structure de l’histoire, les deux compères y travaillant à Paris avant de se retrouver, quelque temps plus tard, à Los Angeles afin de finaliser la version du scénario qui servira aux lectures des comédiens. James Caan, Billy Crudup, Lili Taylor, Mila Kunis, le réalisateur n’a pas manqué de puiser au vivier des acteurs américains, même si le rôle principal du film est revenu à un Britannique, Clive Owen, Marion Cotillard ou Matthias Schoenaerts faisant, pour leur part, beaucoup mieux que jouer les utilités. « Je considère avoir eu une chance énorme de pouvoir travailler avec ces acteurs, apprécie-t-il. Et pas seulement en raison de leur notoriété, mais aussi pour leur disponibilité et leur professionnalisme. Toutes les personnes impliquées dans ce film ont fait preuve d’une exigence aussi grande que la mienne, gage d’une vraie collaboration. J’étais anxieux comme il s’agissait de mon premier film en anglais, et il était essentiel pour moi de travailler en confiance avec des acteurs qui ne se contentent pas de venir s’acquitter d’un job. » En quoi ses voeux auront été exaucés au-delà de ses attentes, jusqu’à lui inspirer un parallèle entre Clive Owen et François Cluzet, qu’il avait dirigé dans Ne le dis à personne: « Leur réaction initiale à tous deux a été de me demander de couper quelques répliques. Il y a un désir de jouer plutôt que de dire des choses, ce qui a constitué une grande inspiration. »

Au passage, après un Laurent Cantet (Foxfire) ou un Arnaud Desplechin (Jimmy P. ), et bien que dans des styles fort différents, Guillaume Canet vient grossir les rangs des cinéastes français ayant tenté récemment l’aventure d’un film made in USA.

« Ces dernières années, de nombreux réalisateurs étrangers sont allés aux Etats-Unis pour y tourner des films d’auteur. Il est évident que la manière de faire des films aux USA et en Europe est fort différente. Et il est intéressant d’observer également que de grands réalisateurs comme Alfonso Cuaron ou Alejandro Gonzalez Inarritu, lorsqu’ils ont été engagés aux Etats-Unis pour tourner de gros films, y ont apposé leur griffe personnelle. Peut-être que venant de l’extérieur, on a plus de distance et l’on essaye de voir la société un peu différemment. » Postulat n’excluant d’ailleurs pas un certain fétichisme cinéphile, venu irriguer son Blood Ties, une expérience dont Canet estime qu’il y aura un avant et un après: « J’ai appris à être beaucoup plus direct, tant en termes de direction d’acteurs, qu’au tournage, où j’ai dû aller beaucoup plus à l’essentiel. Et même jusqu’au montage… » Voire toutefois: présenté à Cannes dans une version de 2 h 24, Blood Ties a, depuis, été raboté de 17 minutes…

RENCONTRE Jean-François Pluijgers, À Cannes

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