La soixantaine poivre et sel, Jan Willem Sligting est programmateur au Paradiso. Rectification: Jan Willem Sligting est LE programmateur du Paradiso, en fonction depuis 1982. Depuis plus longtemps encore, il fréquente l’endroit. « Mon premier concert au Paradiso? Cela devait être Dexter Gordon », en 1969 -le saxophoniste jazz en tirera même un album live, sorti deux ans plus tard. Aujourd’hui, il gère donc les propositions artistiques du Paradiso, avec un mot d’ordre: « La qualité », dit-il, rejetant toute idée d’élitisme: « Cela peut être très large et embrasser plein de genres. Le principe est qu’on veut rendre les choses possibles plutôt que les freiner. Et programmer les bons artistes au bon moment. «  Propriété de la ville, le bâtiment est loué par la société Paradiso qui occupe près de 300 personnes. Ces dernières années, la salle a évidemment bénéficié du boom du secteur du live. Mais avec sa capacité limitée à 1500 spectateurs, le Paradiso reste un pari économique. « Cela n’est pas évident financièrement. Comme pour toutes les salles en général. On est un peu dans la même configuration qu’une salle comme l’Ancienne Belgique par exemple. On doit rester prudents. Avant, le public venait au Paradiso les yeux fermés, en ne regardant pas la programmation. Aujourd’hui, cela ne se passe plus du tout comme ça! Les gens ne viennent plus par hasard. « 

Inutile pourtant de lancer Sligting sur le couplet nostalgie. « La liste d’artistes incroyables qui ont joué ici est très longue. Mais vous ne trouverez pas une seule photo dans les couloirs du bâtiment. « Loin du « centre de détente cosmique » des débuts, le Paradiso est devenu une entreprise live comme une autre, maillon d’une internationale du concert. Le lieu est bien un monument classé, mais cela n’a pas empêché de moderniser toute la machinerie. Il y a quelques années, le Paradiso a même été une des premières salles à diffuser des concerts sur le Net, via le site Fabchannel.  » Mais cela coûtait plus cher que cela ne rapportait. On a dû arrêter. Aujourd’hui, de toutes façons, tout le monde peut quasi recréer sa propre vidéo à partir des extraits sur YouTube. »

N’empêche: aussi moderne se veut-il, le Paradiso n’échappe pas tout à fait à son histoire. En juin dernier, les Bruxellois de Great Mountain Fire étaient de passage dans le temple rock amstellodamois. Alexis Den Doncker: « Personnellement, je n’y étais jamais allé, mais j’en avais déjà entendu souvent parler. C’est un lieu qui respire davantage que la musique. Ce qui est toujours assez stimulant quand vous devez jouer dans un endroit pareil. Il a le côté un peu tristounet de certains bâtiments du XIXe, mais est de ceux qui ont de la gueule. On sent qu’il s’y est passé des choses, des événements qu’on a oubliés, mais qui créent une certaine atmosphère. Pour comparer, l’Ancienne Belgique est une salle géniale, mais avec une histoire à laquelle on peut encore se relier directement. Au Paradiso, tu sens que les murs témoignent d’un monde qui a disparu. Beaucoup de salles perdent leur caractère en devant s’adapter aux impératifs techniques modernes. Ici, par contre, la fusion est réussie. »

L.H.

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