LECONTE EST BON – SOUS LA FANTAISIE MACABRE DOPÉE À L’HUMOUR GENTIMENT CAUSTIQUE, UN ÉLOGE TENDRE DU RIRE ET DE LA BONTÉ PAR UN RÉALISATEUR DÉCOUVRANT LES JOIES DE L’ANIMATION.

DE PATRICE LECONTE. AVEC LES VOIX DE BERNARD ALANE, ISABELLE SPADE, LAURENT GENDRON. 1 H 15. DIST: IMAGES & VISIONS.

En un gros quart d’heure, le making of proposé en bonus (carnet de croquis, textures, enregistrement des voix, animatic, mise en relief…) fait l’inventaire, pas loin d’être exhaustif, des enjeux techniques et esthétiques de ce Magasin des suicides. L’articulation de son univers graphique -mieux que le sous-Burton à la française un temps annoncé- constitue en effet sans doute le seul véritable argument majeur du film d’un Patrice Leconte résolument impliqué à toutes les étapes de sa fabrication.

Bédéiste au journal Pilote dans ses jeunes années, le cinéaste est aujourd’hui en âge de voyager avec la carte vermeil, mais n’avait encore jamais tâté de l’animation. Même si l’impact des jeux sur la profondeur de champ induite par la 3D (ou 2D relief) s’étiole au format DVD, le résultat, carburant aux loopings visuels, est convaincant -suffisamment en tout cas pour que Leconte décide de prolonger l’expérience: son deuxième film d’animation, Music!, est déjà annoncé pour Noël 2015.

Dans Le Magasin des suicides, le réalisateur français pousse la porte du commerce peu commun de la famille Tuvache, lequel ne manque pas, dans un cadre urbain accablé où prolifère la dépression façon chape de plomb, d’écouler par brouettes entières les produits les plus divers et singulièrement variés pour se donner la mort. Jusqu’au jour où vient au monde le petit Alan, dont l’inaltérable joie de vivre pourrait bien contaminer jusqu’aux plus tourmentées des âmes en peine…

De cette adaptation joyeusement animée du roman de Jean Teulé, Leconte tire un honnête divertissement anti-crise, la fin, désespérée, du bouquin mutant devant sa « caméra » en une conclusion à l’optimisme aussi improbable que béat. Avec ses nombreuses séquences dansées et chantées, le film fonctionne au fond sur un principe proche d’une comédie musicale, posant, 1 h 15 durant, un petit monde certes foisonnant et graphiquement inventif mais passablement dénué d’enjeux dramatiques. S’amusant des con-traires, il donne ainsi plus d’une fois le sentiment de tourner en rond. Reste que dans ses meilleurs moments, hirsutes et vachards, il laisse entrevoir ce qu’il aurait pu être tout du long: un remède (en)chanté à la sinistrose ambiante.

NICOLAS CLÉMENT

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