Filmer le quotidien

Sur la couverture, Delphine Seyrig dans l’emblématique film féministe de Chantal Akerman Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles. Un choix significatif pour un ouvrage collectif interrogeant la représentation de nos vies quotidiennes par le cinéma. Curieusement, le sujet n’a jusqu’ici pas suscité beaucoup de travaux abordant une thématique pourtant des plus présentes. Comment les gens vivent-ils, quel regard posent les cinéastes sur nos faits et gestes, nos façons d’habiter, de nous déplacer, de nous vêtir, de parler, de travailler? Et comment les images ainsi composées (dans la fiction) ou captées (dans le documentaire) en viennent à influencer notre quotidien? Deux questions majeures, auxquelles une douzaine d’auteurs veulent répondre dans une suite de contributions réunies sous quatre têtes de chapitre: Formes et rituels, Rythmes et temporalités, Conditions et expériences de vie, et Villes et sociabilités. De belles pages sont consacrées à l’oeuvre de Yasujiro Ozu, à celles d’Alain Resnais, Maurice Pialat et Wang Bing, entre autres. Pour une publication de niveau universitaire, l’ensemble est d’une lecture accessible et agréable. Truffé d’exemples concrets même si avare en illustrations extraites des films cités, le livre invite à regarder de manière plus attentive encore ces choses en apparence banales sous lesquelles se cache beaucoup de sens, et dont la caméra (d’auteur ou commerciale) nous révèle les richesses palpables. Comme le faisait radicalement Akerman dans Jeanne Dielman avec sa mère de famille, veuve et prostituée occasionnelle, dont chaque geste témoigne de manière douloureuse de cette interrogation adaptée de la phrase célèbre d’Aragon:  » Est-ce ainsi que les femmes vivent?« 

Sous la direction de Sarah Leperchey et José Moure, éditions Les Impressions Nouvelles, 256 pages.

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