ENTRE MEURTRES AU GRAND JOUR ET INFILTRATION FINAUDE, DEUS EX: HUMAN REVOLUTION INVITE LA CYBERNÉTIQUE À LA TABLE DE SES OPÉRATIONS. UN JEU DE RÔLE QUI HONORE LA CULTURE CYBERPUNK.

The Anonymous, WikiLeaks, 10 millions de Visa dérobées (sur PlayStation 3) et le PC banking récemment siphonné (chez Dexia et ING). De l' »hacktivisme » au casse bancaire, la guerre des réseaux décrite par William Gibson dans son Neuromancien est passée de l’underground à la vie publique ces dernières années. Et le pire se prépare derrière les ports Ethernet. La culture cyberpunk à laquelle ce livre prophétique publié en 1984 a donné naissance ( Matrix et eXtistenZ, notamment, au cinéma), elle, vibre d’actualité. Mégalopoles gonflantes, multi-nationales omnipotentes, néolibéralisme aveugle, règne du Web, chaos social… Parmi les thèmes de ce mouvement littéraire contre-utopique, l’augmentation des capacités physiques et mentales du corps humain par l’ingénierie et la médecine occupe une place de choix.

Déjà croisé dans Syndicate et System Shock, ce thème cybernétique avait trouvé un écho sans équivalent dans Deus Ex en 2000. Finaud comme aucun autre, le jeu de tir en vue subjective revient pour un 3e tour de piste après Deus Ex: Invisible War, suite qui déçut plus d’un nerd en 2004. « Le point de départ du projet, c’est Square Enix/Eidos qui voulait ouvrir un studio en Amérique du Nord, avoue Jacques Belletête, directeur artistique du projet chez Eidos Montréal et Canadien francophone pur jus. Il y a une nouvelle dynamique du jeu vidéo dans cette ville qui, en plus d’Electronic Arts et d’Ubisoft, a récemment accueilli des studios de Warner et THQ. Pour attirer des développeurs de talent, Eidos avait donc besoin d’un projet qui soit plus ambitieux qu’une adaptation des aventures des petits poneys… » (rires)

Le retour de Deus Ex n’est donc pas dû à son respecté géniteur, Warren Spector, qui ne possède pas la licence. Mais bien à une volonté d’extension mondiale de son éditeur nippon. Heureusement, ce come-back inespéré brille. Autant que nombre de ses visuels au code couleur entre noir et or. Un clin d’£il à la peinture baroque et à sa symbolique de la métamorphose. « Quand Vermeer ou Rembrandt peignaient le soir, ils le faisaient avec des chandelles. Notre travail est assez comparable. Ici, le noir représente le côté dystopique de Deus Ex: HR et l’or, le corps humain », précise Belletête.

Deus Ex: Human Revolution brosse une société de 2027 divisée en 2, le tout via des coupures de presse, des JT en temps réel et mille autres détails jubilatoires croisés « in game ». D’un côté, le camp des transhumanistes et de l’autre celui de ses opposants luttant contre toute modification corporelle par la technologie. Au centre de cette SF médicale, le chef de la sécurité de Sarif Industries Adam Jensen, qui se fait involontairement greffer 2 bras artificiels suite à un attentat perpétré par des terroristes anti-bioniques contre son employeur, trempé jusqu’au coup dans la cybernétique expérimentale.

Pas pour les têtes brûlées

« Les gens ont tendance à penser que notre enveloppe charnelle est la finalité de l’évolution. Mais c’est une idée conditionnée. Les prochaines étapes de notre évolution humaine seront technologiques. Même si on essayait de l’empêcher, cela se ferait de façon clandestine.  » Sans manichéisme et sans réponse sur son débat, Deus Ex: Human Revolution mise donc à fond sur la métamorphose physique d’Adam Jensen. Et déploie un gameplay dont la colonne vertébrale tourne autour d’un choix d’actions vertigineux qui se déploiera au fil d’une enquête et de missions à Detroit, Hengsha (ville chinoise à 2 étages!) puis Montréal.

Manette en mains, le discours transhumaniste de Deus Ex: Human Revolution offre un prétexte idéal à l’amélioration des compétences de Jensen. Des points acquis lors des missions se répartissent ainsi sur une multitude d’arborescences articulées entre crâne, torse, bras, yeux, dos, peau et jambes. Indispensable pour progresser, ce trifouillage de menus permettra d’ouvrir un des itinéraires bis menant à la conclusion d’une mission.

En cas de contact avec l’ennemi, Deus Ex se paie le luxe d’une approche frontale ou plus furtive façon Metal Gear Solid ou Splinter Cell. Dans le premier cas, la préparation de son inventaire offensif, la gestion de la couverture façon Gears Of War et la stratégie de terrain dicteront la bonne issue des combats. Patience et observation seront quant à elles de mise en cas de progression en mode infiltration. La carte indiquant le niveau d’alerte, position et sens de déplacement des ennemis devra donc être scrutée avec attention.

Si sur papier, cette approche kaléidoscopique semble trop ambitieuse (et complexe) pour être plaisante, dans les faits elle happe sans peine, d’autant que l’on peut combiner les tactiques selon l’humeur (et les compétences) du moment. Parfois à la masse dans ses dialogues et livrant des décors souvent confinés, Deus Ex: HR souffre de sa volonté utopique d’ultra réalisme et la gestion de l’inventaire à la Tetris se montre assez rébarbative. Mais, qu’on se le dise, Deus Ex: Human Revolution brille autant qu’un Fallout 3 dans son approche FPS et jeu de rôle. Une bouffée d’oxygène salvatrice dans une ludothèque FPS où le fire & forget conditionné par des shooters de consommation courante comme Call of Duty: Black Ops est de rigueur. l

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u DEUS EX: HUMAN REVOLUTION (lllll), ÉDITÉ PAR SQUARE ENIX ET DÉVELOPPÉ PAR EIDOS MONTRÉAL, ÂGE 18+, DISPONIBLE SUR PC, PLAYSTATION 3 ET XBOX 360.

TEXTE MICHI-HIRO TAMAÏ

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