Critique

À la télé ce mardi soir: Des patrons et des hommes

Des patrons et des hommes © Arte
Guy Verstraeten
Guy Verstraeten Journaliste télé

L’économie d’aujourd’hui n’est plus celle d’hier. Les capitaux se sont ouverts, les échanges se sont libéralisés, la concurrence s’est accrue, les banques publiques ont quasi disparu, les actionnaires ont pris toujours plus d’importance. Forcément, les évolutions dans les structures économiques ont également influé sur le comportement des grands patrons.

Comme le signale Jean-Michel Meurice, l’un des réalisateurs de ce documentaire en deux épisodes, dans un entretien qu’il accorde à Arte: « Quelqu’un comme Lakshmi Mittal est un patron financier international qui n’a aucune racine avec ses entreprises. Les fermer n’est pas un souci pour lui. Seule la rentabilité l’emporte. »

Par essence, les patrons n’ont jamais fait dans l’humanitaire avec leurs business. Les grands romans de Zola sont là pour en témoigner. Mais tout n’a pas toujours trempé dans la mare de cynisme que l’on connaît aujourd’hui. Les magnats paternalistes d’antan avaient, malgré tout, un véritable lien avec leurs usines. C’est le cas notamment de Marcel Dassault qui, et cela ouvre un autre chapitre du film, n’était par ailleurs pas le dernier à graisser les pattes des hommes politiques. Lobbying, conflits d’intérêts, délits d’initiés, corruption: Des patrons et des hommes raconte aussi cette dérive, dans un monde où les frontières entre économie et politique sont devenues de plus en plus poreuses.

L’autre grand axe de ces deux heures et demie de film, c’est la comparaison des modèles français et allemand. Une Allemagne dépeinte comme plus performante, notamment grâce à ses énormes complexes industriels (les usines chimiques de BASF entre autres) et la manière dont patronat et syndicats travaillent main dans la main, pour le meilleur et pour le pire, depuis l’après-guerre. De 1950 à nos jours, le film dépeint donc cette mutation du patronat, qui a dû s’adapter à la mondialisation des échanges et à l’impact toujours plus dense de la finance, tout en gardant un oeil plus général sur l’organisation du travail et sur la question de la productivité. Il le fait à grands renforts de témoignages fort éclairants, même si un poil de didactisme supplémentaire aurait certainement fortifié le dispositif. Cela posé, Des patrons et des hommes s’affiche comme un documentaire d’une grande pertinence.

  • DOCUMENTAIRE DE JEAN-MICHEL MEURICE, BENOÎT COLLOMBAT, DAVID SERVENAY.
  • Ce mardi 7 octobre à 20h50 sur Arte.

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