Critique | Livres

Zidrou touche à tout

Zidrou © Dargaud/Rita Scaglia
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

Le prolifique scénariste belge multiplie les albums en tout genre et pour tous les publics. Une boulimie qui jure avec son relatif anonymat.

Dans l’horoscope chinois, Benoît Drousie (de son vrai nom) tient probablement du chat: on ne sait s’il aura un jour vécu sept vies, mais le scénariste belge, né à Bruxelles il y a 50 ans, exilé en Espagne depuis quinze, en a déjà épuisé quelques-unes. Lui qui fut d’abord instituteur, puis scénariste pour enfants, multiplie aujourd’hui les projets plus adultes et volontiers provocants. Deux albums viennent ainsi de paraître chez Dargaud, lesquels n’ont vraiment plus rien à voir avec L’Elève Ducobu -son plus grand succès et sa vache à lait, qui continue sans doute de faire un peu d’ombre au reste de sa carrière pourtant protéiforme et pas sans intérêt.

Zidrou touche à tout

Il y a d’abord la surprise: Zidrou s’aventure avec Marina et Matteo sur les rives de la série historique et (très) violente, plus proche cette fois d’un Dufaux que d’un Cauvin. Marina, fille du Doge de Venise, qui va connaître au XIVe siècle les pires outrages avant d’assouvir sa vengeance, laquelle trouvera écho jusqu’aujourd’hui. Rien que dans ce tome 1, la jeune fille sera battue, violée, torturée et trahie par son père… Ça promet. Dans une veine autrement plus intime et contemporaine, le scénariste a auparavant sorti un très beau one-shot dont le titre a dû causer la pendaison de plus d’un représentant. Ce Roi de Prusse, magnifiquement mis en dessin par l’Espagnol Roger, se veut lui un hymne aux seuls vrais héros de notre temps: les mères, et en particulier Madame Hubeau, 72 ans, maman d’un gros bébé de 43 ans, handicapé mental. Une ode à la vie et au courage maternel taillée, elle, en saynètes du quotidien.

Multiple et cohérent

Zidrou touche à tout

Des one-shots intimistes, une tragédie vénitienne, des séries pour enfants… Zidrou se multiplie, et pourtant reste le même: on retrouve derrière tous ses scénarios apparemment bigarrés le même goût de la bande dessinée populaire, au sens le plus noble du terme, qu’il saupoudre pourtant à chaque fois, et à chaque album un peu plus, d’un brin de perversité, de provocation et parfois de leçons de morale trop sentencieuses. Scénariste à tout faire dans le journal de Spirou, époque Tinlot, Benoît Drousie y a entre autres inventé Tamara, la grosse ado aux antipodes des canons habituels, dont les lecteurs ont pu suivre chaque étape de son éducation sexuelle. Récemment, il mettait mal à l’aise jusqu’à son jeune public avec Tueur de mamans, diptyque sadique pour les ados, relatant la mise à mort de plusieurs mères… Zidrou n’a pas fini de surprendre, ni de se réinventer.

  • PENDANT QUE LE ROI DE PRUSSE FAISAIT LA GUERRE, QUI DONC LUI REPRISAIT SES CHAUSSETTES?, ONE-SHOT DE ZIDROU ET ROGER, ÉDITIONS DARGAUD, 56 PAGES.
  • MARINA (TOME 1), HISTOIRE DE ZIDROU ET MATTEO, ÉDITIONS DARGAUD, 56 PAGES.

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