Avignon 2012: Aux Belges, etcetera…

© Charlotte Sampermans
Nurten Aka
Nurten Aka Journaliste scènes

Allons artistes de la patrie… En Avignon, nos Belges sont en bonne terre d’accueil. Deux lieux du Off affichent la scène francophone: Les Doms (public) et la Manufacture (privé). D’autres se débrouillent comme La Charge du Rhinocéros avec spectacles et chocolats…

Dans cette Internationale du spectacle vivant, tout dépend de comment on place ses billes. Les Francophones s’installent au Off, les Flamands s’attirent le In.

Situé près du Palais des Papes, le Théâtre des Doms, acheté par la Fédération Wallonie Bruxelles, l’annonce clairement « la vitrine Sud de la création contemporaine en Belgique francophone ». Premier succès, faisant salle comble, dès 11h: La Nostalgie de l’avenir de Myriam Saduis, une adaptation originale, à rebours, de La Mouette de Tchékhov réduite aux personnages principaux, défendue par une troupe investie. L’enjeu pour tous: plus de 200 programmateurs passent par les Doms, une aubaine d’exportation efficace dans divers petites scènes de France. Autre succès, souvent « sold out » à 20h30: Une société de services de Françoise Bloch, un spectacle sur la pression/aliénation au travail par le thème du télémarketing! 4 excellentes comédiens, se mouvant dans une palette de jeu et d’accents. Coup de coeur. Le dernier spectacle -à 22h15- It’s so nice, est centré sur deux reines du 16e siècle, Marie Stuart d’Écosse et Elisabeth Tudor! Dans l’exercice du « dérapage », on joue sur le kilt, en anglais comique, avec des généalogies-express, des docus vidéo, un peu de danse et des « flèches acérées » entre les deux comédiennes. Humour second degré, gag sur gag, la salle s’amuse… Ci-gît un bon sujet, qui nous donne envie de suivre cette jeune compagnie: Oh My God/Lula Béry et Barbara Sylvain.

Au franco-belge

Autre scène de taille, La Manufacture, un lieu mixte de spectacles belges et français, géré par un collectif d’artistes et de producteurs. Un lieu privé (un garage et une patinoire aménagés) dont les « créneaux » sont vendus -de 14 à 15.000 euros- à des théâtres, des artistes, ou des compagnies. Espaces vendus mais programmation exigeante, résolument contemporaine. La Manufacture affiche complet dès avec 10h40 avec Le Signal du promeneur, 1er shoot du Raoul Collectif, coproduit par le National. Une bande de cinq jouant Into the wild. Bourrés de talent, leur spectacle puise dans l’artisanat théâtral, démarrant un quart d’heure dans le silence total et le noir complet, éclairé à la torche, passant en douce de la nature au tribunal des hommes pour interroger -par la marge- un monde formaté qui part en couille. Ces jeunes « rebels » ont du propos et de la poésie qui marquent les spectateurs. Comme Baal, autre succès, lui aussi coproduit par le National et… le KVS. Joué, en alternance, en français et en néerlandais. Baal, de Bertolt Brecht suit le destin d’un (anti-)héros, imbibé d’alcool, narguant la société bourgeoise.

Enfin, la structure de production La Charge du Rhinocéros est dans l’coin, avec quatre spectacles et des centaines d’éventails et du chocolat offerts. Au-delà des gadgets de promotions qui plaisent, ils touchent le public avec 4 spectacles dont à Ayiti de et par Daniel Marcelin, ou encore les témoignages aigres-doux des Pères de Julie Annen.

Dans la masse des spectacles d’Avignon, l’oeil est tôt ou tard posé sur les Belges, toutes disciplines confondues. La chorégraphe Karin Ponties est aux Hivernales, « la » scène de danse d’Avignon, le duo de clown Okidok rejoue leur Slips inside, le texte de Thierry Debroux, Made in China est monté par une troupe française, la comédienne Laurence Vielle joue en solo Sainte sous l’incendie dans une mise en scène française. Le cirque de Carré curieux et L’Autre de Caludio Stellato se jouent sous chapiteaux. Blasband produit un double moment de lecture, Isabelle Wéry lit sa Mort du cochon, Alex Virozek développe le rayon humour et Pie Tshibanda reprend son tube un Fou noir au pays des blancs. Sans oublier cette soûlante affiche, Faites l’amour avec un belge: un type au cornet de frites entre 2 jambes écartées. Ça donne le niveau! Heureusement, à Avignon, la scène francophone dépasse le divertissement du mauvais Off.

Les Flamands sans Off

Côté scène flamande, malgré le peu de spectacles dans le In cette année (dernier Cherkaoui et Platel produisant deux Portugais), décidément le « Off » n’est pas un terrain d’investissements des Flamands. Rares sont les compagnies (connues, inconnues, jeunes, fauchées, etc.) qui y sont, excepté le projet bilingue Baal et un duo de clowns, Wure-Wure. Et pourtant -comme quoi la connerie n’épargne pas les organisateurs des festivals- on peut lire dans le guide du Carnet du Off 2012, un débat annoncé sur la scène flamande. Texto: « …Les Flamands se sont peu intéressés au OFF… Or, cette année, ils arrivent en force. » Archi-faux, même si on le souhaite ardemment, découvrir cette scène flamande, alternative, hors des gros (bons) circuits du In et d’ailleurs.

En attendant, si vous passez à Avignon, le premier rendez-vous des Belges est d’office aux Doms et à la Manufacture.

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