La Madeleine: concurrentielle ou complémentaire, la nouvelle salle de concerts bruxelloise?

La salle de la Madeleine a ouvert ses portes officiellement ce jeudi © BELGA
Marise Ghyselings Journaliste

Sans perdre son caractère authentique, la Madeleine a ouvert ses portes ce jeudi 18 février comme salle de concerts et de spectacles. Gérée dorénavant par Brussels Expo, la « petite » nouvelle du milieu culturel soulève tout de même quelques questions.

« On espère que la Madeleine deviendra un must pour les organisateurs, pour les artistes mais surtout pour le public. » Le ton est donné par Denis Delforge, CEO de Brussels Expo, l’asbl qui a repris la gestion de la salle de la Madeleine. La nouvelle salle de concerts et de spectacles, qui a ouvert ses portes officiellement ce jeudi, est prête à compter dans le paysage culturel bruxellois.

Ancien marché couvert (1848), salle de fêtes de la Ville de Bruxelles (1957) et lieu d’accueil pour le Casino (2006), la salle de la Madeleine arbore aujourd’hui un nouveau visage. Après six mois de rénovation sans toucher à la façade ou aux deux escaliers encadrant la scène, elle est devenue une salle de concerts et de spectacles d’une capacité de 250 à 1050 places. Les changements? Une meilleure acoustique, plus de confort et plus de sécurité. Au terme de la deuxième phase de travaux qui permettra d’utiliser les balcons, la « petite » nouvelle pourra accueillir 1500 personnes.

Comme prévu en juin dernier, c’est désormais Brussels Expo qui exploite les lieux repris en main par la Ville. « Ces dernières années, La Madeleine était sous-utilisée et il m’importait de la rapatrier dans le giron de la Ville de Bruxelles. Ceci afin de la valoriser et de l’exploiter adéquatement », confie Mohamed Ouriaghli, Echevin des Propriétés communales et de l’Egalité des chances, présent ce jeudi à la présentation des lieux rénovés dans lesquels la Ville a investi un million d’euros.

Selon Denis Delforge, le seuil de rentabilité de la salle devrait être atteint à partir de 70 à 80 événements par an. Pour le moment, une trentaine de concerts sont programmés dont Bloc Party, Les Innocents, L.E.J et Abd Al Malik. La convention liant la Ville et Brussels Expo, pour une durée de 50 ans, prévoit pour le surplus de réserver dix journées par an au milieu associatif bruxellois. Les groupes musicaux pourront également réserver l’endroit pour des résidences. Des projets de coproduction et de programmation propres pourront aussi y être organisés.

La transformation de la Madeleine en une salle de concerts et de spectacles
La transformation de la Madeleine en une salle de concerts et de spectacles© BELGA

Concurrence inutile?

« La Madeleine n’aura pas une seule couleur », explique Denis Gérardy, directeur artistique de la salle. Il annonce qu’elle sera destinée aux artistes en tout genre et « aux publics, au pluriel. Mais une large place sera consacrée à la musique urbaine ». « On veut compléter l’offre culturelle et pas la concurrencer », ajoute Bea Goedhuys, directrice Booking et Communication de La Madeleine. Denis Delforge insiste quant à lui sur l’importance d’offrir des salles de différentes capacités aux artistes « pour qu’ils puissent monter petit à petit. On les assiste alors dans l’ensemble de leur carrière. J’aime penser que la Madeleine est l’incubateur du Palais 12. »

Mais une question se pose dans le milieu: dans un contexte difficile pour le monde culturel, manquait-il vraiment une salle d’une telle capacité? « Une nouvelle salle, c’est en tout cas de la concurrence. Mais pour l’AB, nous devons parfois refuser des artistes donc cela veut dire qu’il reste de la place dans notre capacité d’accueil (2000 personnes, ndlr), explique Dirk De Clippeleir, directeur de l’Ancienne Belgique. Si l’offre de la Madeleine reste complémentaire à la nôtre, il n’y a aucun souci. » Du côté du Botanique, qui peut accueillir 700 personnes dans l’Orangerie et 2000 au Cirque Royal, son programmateur Paul-Henri Wauters reste perplexe. « En novembre, la demande explose. Les agents cherchent des salles mais ces salles, il faut les remplir. Et le public, on lui court après! » Pour lui, une nouvelle salle de cette capacité n’était pas indispensable. « S’il faut ajouter des lieux culturels, il faudrait d’abord soutenir des lieux d’émergence qui peuvent accueillir 100 à 200 personnes. »

Bruxelles gagne du terrain

Les deux salles émettent toutefois des doutes sur le rôle de la Ville de Bruxelles dans le paysage culturel. « Ce n’est pas le rôle d’un pouvoir public d’organiser des concerts, explique Dirk De Clippeleir. Notre gouvernement doit trouver des infrastructures optimales mais qui lui sont indépendantes. Par exemple, l’AB appartient à la Communauté flamande mais le programme, lui, est indépendant. En ce qui concerne la Madeleine, ce n’est pas très clair. »

La Ville de Bruxelles, propriétaire de La Madeleine, loue le bâtiment à l’une de ses asbl, Brussels Expo dont Philippe Close, échevin des Finances, du Personnel et du Tourisme, est le président. Ce groupe a déjà dans son « portefeuille de salles » -pour reprendre le terme de son CEO Denis Delforge- le Palais 12 qui peut accueillir 2.500 à 15.000 personnes. Il comprend également le Brussels Summer Festival, la société de divertissement SA Fire-Starter et bientôt le projet NEO qui prévoit l’urbanisation d’une large part du plateau du Heysel entre autres via la création de logements, d’un centre commercial et d’un complexe de loisirs. Avec son asbl Brussels Expo, la Ville de Bruxelles devient donc de plus en compétitive dans le secteur culturel. En septembre dernier, elle montrait également son intention de reprendre la gestion du Cirque Royal au Botanique. Le centre culturel s’exprimera à ce propos fin mars…

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