Critique scènes: Je suis Eddy

© Alice Piemme
Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Le Collectif La Bécane et la compagnie Gazon-Nève réussissent leur pari de porter à la scène le premier roman d’Edouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule. Une adaptation fidèle et pleine de tendresse.

A priori, des deux adaptations des romans d’Edouard Louis créées quasi simultanément chez nous et actuellement en tournée, celle de En finir avec Eddy Bellegueule était la plus casse-gueule. Car là où Qui a tué mon père repose sur un monologue adressé au père par le fils et pensé pour le théâtre, le premier roman du jeune prodige français contient une galerie de portraits qui, incarnés, risquaient de tomber dans la caricature et quelques scènes sulfureuses bien délicates à donner à voir. Mais on vous rassure: de cet exercice périlleux, le Collectif La Bécane, Jessica Gazon (à la mise en scène) et Thibaut Nève (à la dramaturgie) sortent plus qu’honorablement, évitant les écueils tout en restant proches de l’oeuvre originale.

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Ca démarre fort. Déjà sur scène alors que les spectateurs s’installent dans la salle, Janie Follet, Sophie Jaskulski, Louise Manteau et François Maquet évoluent au milieu des éléments mouvant du décor, en mode karaoké survolté. « J’ai pas choisi de naître ici/Entre l’ignorance et la violence et l’ennui », « J’m’en sortirai, je te le jure/À coup de livres, je franchirai tous ces murs »… D’emblée, les paroles d’Envole-moi, le tube de 1983 de Goldman, prennent une nouvelle vigueur, résumant anticipativement le parcours de transfuge de classe d’Eddy Bellegueule/Edouard Louis.

Après ce prélude musical, qui ménage également une place d’honneur à l’indispensable Céline Dion, les acteurs poursuivent dans leur propre peau pour livrer quelques éléments biographiques, souvenirs de jeunesse cruels et mention de ce qui les « a sauvés ». Par ce biais, ils donnent ce « quelque chose en nous d’Eddy » qui les implique directement dans l’histoire qu’ils se partagent et ouvre la porte à la tendresse plutôt qu’à la moquerie.

Dans ce contexte, justice est rendue au roman qui, un pied dedans, un pied dehors, retrace la jeunesse difficile d’Eddy Bellegueule dans une famille ouvrière et nombreuse du Nord, entre parents déboussolés par son attitude efféminée, brimades diverses à l’école, découverte de la sexualité et tentatives de réponse aux injonctions de virilité. Sur une B.O. qui inclut aussi bien Gala que La Fouine et Keen V, entrecoupé de séquences vidéo (longuettes) de paysages du cru, ce très accessible En finir avec Eddy Bellegueule assure « avec élégance » sa mission.

En finir avec Eddy Bellegueule.Jusqu’au 10 février à la Maison de la Culture de Tournai, les 16 et 17 février au Théâtre le Manège à Mons, du 23 au 25 février à l’Ancre à Charleroi.

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