Ovni(s), saison 2: poésie et science-fiction

Didier Mathure (Melvil Poupaud) à la recherche d'une intelligence lointaine.
Nicolas Bogaerts Journaliste

La nouvelle saison d’Ovni(s) prolonge l’exploration émerveillée des frontières de la science. Elle brasse, dans un style inclassable, références et poésie cosmiques. Entretien et critique.

Nous avions quitté Didier Mathure (Melvil Poupaud) en pleine rencontre du troisième type sous LSD sur le plateau du Larzac. L’épiphanie a été telle que le jadis très cartésien directeur du GEPAN, organisme chargé de l’étude des ovnis, sillonne désormais la France en combi VW en compagnie de Véra (Daphné Patakia), à la recherche d’autres manifestations extraterrestres. La révolution copernicienne n’a épargné personne au GEPAN, dont les membres se sont éparpillés aux quatre vents. Rémy (Quentin Dolmaire) s’est rangé dans une boîte d’informatique. Seul Marcel (Michel Vuillermoz) reste avec André (Jonathan Lambert), son compagnon, qui veille à la destinée d’une institution cultivant désormais le doute systématique. L’ex de Didier, Élise, est quant à elle propulsée directrice du Centre National d’Études Spatiales (CNES), dans un monde masculin qui guette son premier faux pas. La constellation de personnages se reconstitue sur fond de manifestations surnaturelles dans un continuum de drôlerie, de références culturelles généreuses et de réflexion sur la science et les multiples bizarreries de l’existence.

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Tendrement foutraque

Après un premier lancement réussi, les scénaristes Clémence Dargent et Martin Douaire se sont ingéniés, aidés par Maxime Berthemy, à faire voyager leur petit monde dans une dimension ouverte à de nouveaux défis, en gardant l’énergie chorale du récit. « Un des enjeux était de réunir les personnages pour raconter, toujours fidèle à cet esprit très Scooby-Doo, les répercussions de la fin de première saison« , nous racontait Clémence Dargent cet hiver, en compagnie de ses coscénaristes, dans le confort d’un palace parisien. « Il s’agissait de renouveler l’histoire et les intrigues, de ramener l’équipe au bercail, d’inclure de nouveaux personnages. » Jonathan Lambert, entrevu l’an dernier, donne désormais une pleine dimension à son personnage d’André. Alice Taglioni incarne Claire Carmignac, envoyée par le président Giscard d’Estaing pour mettre de l’ordre dans une mission qui perd le nord.

Plus que jamais, OVNI(s) s’ancre dans une époque, ici l’année 1979, dont elle reconstitue l’ambiance sans recourir à la parodie. « Les thématiques s’inspirent du contexte historique et culturel: la sortie de Superman, la tragédie des boat people dont les images des embarcations pleines à craquer ont beaucoup agité l’espace médiatique, le nucléaire, la crise pétrolière et cette relation toujours compliquée entre sciences et croyances. Des thèmes qui résonnent évidemment avec l’actualité. » Par échos radiophoniques ou télévisuels, dans des clins d’oeil appuyés, ces événements harmonisent une trame comique, toujours aussi psyché et tendrement foutraque, avec la vraisemblance très élastique et parfaitement assumée du thème extraterrestre.

Ovni(s), saison 2: poésie et science-fiction

Accidents déclencheurs

L’irruption d’une Barbapapa géante dans une centrale nucléaire marie la science-fiction avec une poésie métaphorique. Nos héros malgré eux se réunissent finalement pour tenter d’en percer le mystère. Là encore, la science n’a rien d’une marche triomphale vers la vérité et les tentatives d’explications de Didier Mathure, convaincu qu’une intelligence lointaine cherche à prendre contact, alternent échecs et accidents dans des séquences hilarantes. Pour Martin Douaire, c’est une des clés d’une série qui « est aussi un éloge de la tentative ratée. Les trajectoires de la connaissance scientifique sont des grands sacerdoces parcourus par des désillusions, des impasses, des accidents déclencheurs. Dans le boulot ou la vie personnelle, on a beau tout vouloir régir, dominer l’imprévu, il y a des choses qui échappent à tout contrôle. Cette saison s’appuie sur ce constat. »

Elle le fait avec ce mariage de fantastique et de surréalisme qui confère à OVNI(s) ce style inclassable, ce langage attachant. Clémence Dargent le décrit comme « un fantastique un peu spécial, une forme de poésie, d’inquiétante étrangeté, plus surprenante qu’effrayante. Ce qui nous amuse, c’est de confronter des gens très sérieux à des situations insolites. » Dans cet équilibre délicat, cette saison continue à s’affranchir joyeusement d’une crédibilité trop rigide. Au moyen d’images et de situations aux multiples niveaux de lectures, de thèmes musicaux ad hoc et de personnages qui sont, sans doute, les vrais ovnis de l’histoire, elle nous invite à changer de perspectives quant à nos certitudes, à nos injonctions intimes et aux drames qui jalonnent notre destin commun.

OVNI(s) (saison 2)

Série créée par Clémence Dargent et Martin Douaire. Avec Melvil Poupaud, Daphné Patakia, Michel Vuillermoz. À partir du 12/04 à 20h30 sur Be Séries. ****

Ovni(s), saison 2: poésie et science-fiction

Il aura fallu attendre la saison deux d’OVNI(s) pour voir une soucoupe volante. Une vraie. Celle sur laquelle reposait la tasse de café d’un opérateur de centrale nucléaire, théâtre de manifestations surnaturelles. Derrière ce gag aussi naïf que réussi, il y a toute la rigolade, l’audace, la poésie candide et décomplexée de cette série. Et la malice d’un récit qui sème ses niveaux de lecture comme des petits cailloux, entre légèreté fantasque et captation intelligente de nos contradictions modernes. Les thèmes du contact extraterrestre, de la science qui piétine, du couple qui se cherche, des crises migratoire et énergétique se côtoient allègrement sans fausse note. Le tout dans un univers hyper référencé seventies qui se garde bien de toute nostalgie. Car le langage d’OVNI(s) ne cultive pas les madeleines par souci d’exhaustivité, mais bien de cohérence formelle. Et par goût du jeu comique auquel s’adonnent Melvil Poupaud et ses camarades avec un plaisir communicatif. La réalisation d’Antony Cordier, ses choix musicaux soignés, ouvrent des espaces-temps qui s’accordent joyeusement avec les questions de notre présent.

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