Mary-Pain

© National

On ne sait pas grand-chose de la vie de Mary-Pain. Sans emploi à 34 ans, elle est revenue dans son village natal la queue entre les jambes. Petit à petit, les bribes de conversations nous apprennent que sa mère est morte. Par superstition religieuse -nous sommes dans le sud de l’Espagne-, les villageois la rendent responsable de ce décès. Elle devient donc l’objet d’une attention morbide où la crainte et la pitié condescendante se mêlent. Si ses anciennes camarades veulent la revoir, c’est moins au nom d’une amitié passée que par curiosité. Mais Mary-Pain a d’autres chats à fouetter: elle doit s’occuper de son grand-père agonisant, trouver du boulot et régler cette histoire d’hypothèque sur la maison familiale. Si le scénario nous laisse dans le flou quant à sa vie d’avant, le dessin de Lola Lorente ne nous épargne rien de la décrépitude des corps, notamment celui du grand-père dont il faut s’occuper à toute heure du jour et de la nuit. Mais également la grossophobie qu’inspire à certains celui de Mary-Pain. Tout le monde n’est pourtant pas dégoûté par ses formes généreuses. Elle la première s’en accommode parfaitement et en use parfois pour arriver à ses fins. L’autrice espagnole vogue habilement entre onirisme et ambiance cafardeuse. Si la majeure partie du temps son héroïne semble subir les événements, elle fait également preuve d’une certaine résilience. Le dessin à la plume alterne les passages de crudité réaliste assez sombres avec d’autre plus légers, semblant baigner dans une lumière divine. La proportion démesurée des têtes nourrit la ressemblance des personnages à des marionnettes subissant les affres de la vie sans véritable moyen de réagir. Malgré tout, Mary-Pain la loseuse reste une personne que l’autrice arrive à rendre très attachante.

© National

De Lola Lorente, éditions Actes Sud BD, 224 pages.

***1/2

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