Critique | Livres

[La BD de la semaine] Gueule noire, de Lelis et Ozanam

Gueule noire © Casterman
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

ROMAN GRAPHIQUE | Le jeune Marcel broie du noir. C’est même là sa principale activité, puisque Marcel est mineur, comme son père et son frère, depuis l’âge de 14 ans.

[La BD de la semaine] Gueule noire, de Lelis et Ozanam

Un destin tout tracé de gueule noire quand on est comme lui, pauvre et installé dans le nord de la France au début du XXe siècle. Mais un coup de grisou le convainc de tenter sa chance ailleurs et surtout en pleine lumière. Direction Paris, où les désillusions seront encore plus rapides que l’ascenseur qui le conduisait au fond de la terre: ici aussi, les boulots sont précaires et particulièrement pénibles, et Marcel de se lancer alors dans le combat anarchiste, lui aussi teinté de noir et de violence…

Récit initiatique mais surtout charbonneux jusque dans sa mise en scène, Gueule noire n’est pas une histoire de plus sur la dure vie des mineurs. Il suit au contraire les questions existentielles et politiques des prolétaires de l’époque, jetant un regard sans illusion aucune sur les utopies anarchistes, vite rattrapées par la réalité de terrain. Mais ce scénario sans faille, engagé et prenant de Ozanam prend évidemment un tout autre relief avec le dessin tout à fait unique du Brésilien Lelis: travaillant sans encrage, sans couleurs, et uniquement au crayon, il remplit chacune de ses cases d’innombrables traits noirs verticaux, comme si le charbon pleuvait en permanence sur la tête et la vie de Marcel.

Déstabilisant sur les premières planches, ce graphisme radical s’avère au contraire en totale osmose avec son propos, et finit par faire de ces 100 pages une oeuvre qui vous colle à la peau, pire que la poussière de charbon.

DE LELIS ET OZANAM, ÉDITIONS CASTERMAN, 104 PAGES.

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