Théâtre: Étude, le petit frère sérieux de Money!

Le regard des comédiens rivé sur l'interview d'un député européen © Théâtre National
Lola Contessi Stagiaire

Après Money!, le Zoo Théâtre de Françoise Bloch poursuit son étude-critique de l’économie alias l' »éléphant dans la pièce« . Leur pièce Étude est au Théâtre National jusqu’à ce dimanche.

La fin des négociations autour de la loi européenne de séparation bancaire, le procès des américains à la Deutsche Bank et à ses produits toxiques, le travail acharné des lobbyistes bruxellois, le récent endettement de l’Italie pour sauver la Banca Monte dei Paschi: l’économie est partout. Et… on n’en parle pas. C’est du moins l’avis que le Zoo Théâtre s’est fondé après une nouvelle enquête au coeur du milieu financier. Les comédiens de Françoise Bloch sont bien décidés à remettre ces sujets brûlants sur le tapis dans leur nouvelle pièce Étude. Dans la lignée de Grow or go, d’Une société de service et de Money!, elle vient éclairer le monde de la finance et les liens encombrants entre le politique et l’économique.

Trois chercheurs exposent le résultat de leur étude dans une conférence loufoque. Ils se sont penchés par hasard sur le projet de loi européen de séparation bancaire et, comme suffoqués par les découvertes qu’ils ont faites, ils balbutient et se perdent dans leurs notes. L’exposé est pourtant très clair, et c’était sans aucun doute la volonté de la metteuse en scène. Françoise Bloch réalise en effet un théâtre documentaire, menant de véritables enquêtes, exploitant les vidéos et interviews récoltés et visant à créer chez ses spectateurs une prise de conscience. Dans Étude, les trois comédiens en scène (Romain David, Benoît Piret et Pierre Sartenaer) font face à un immense écran. Interviews, schémas, cartographies, streetviews… Derrière leur dos, les documents se succèdent comme autant de preuves d’une quête de véracité.

On attend cependant longtemps que les trois conférenciers sombrent dans la folie qu’ils décrivent. Sur le fil, ils s’en approchent dans quelques moments d’éclats, mais ne basculent jamais totalement. Les acteurs ne paraissent pas vraiment jouer et c’est une des particularités du théâtre de Françoise Bloch. « Je n’étais plus d’accord avec le rapport que les jeunes acteurs dans les écoles entretenaient avec le réel, avec le type d’attention qu’ils lui consacraient, plus pressés d’imiter un film, la télévision ou un autre acteur ou d’être naturels que d’imiter, de capturer, de rendre compte, avec leurs moyens à eux, du réel », déclarait la metteuse en scène à la revue Alternatives Théâtrales en 2011. Les comédiens d’Étude laissent un spectateur éveillé aux scandales oubliés du monde économique, mais étrangement déconcerté d’avoir assisté à un véritable exposé.

Ce n’est pas pour rien que la metteuse en scène critique le langage alambiqué des lobbyistes: opaque, il devient un puissant instrument de pouvoir. C’est donc avec une écriture théâtrale claire que Françoise Bloch traite de sujets complexes. Pour rendre aux citoyens leur pouvoir, elle fait entrer l’éléphant dans la pièce. Gros comme un camion, il surprend le spectateur même si sa présence se fait par moments écrasante.

Études (The Elephant in the Room) de Françoise Bloch/Zoo théâtre, jusqu’au 26/02 au Théâtre National, Bruxelles. www.theatrenational.be

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content