Phoenix: les Bleus, l’Amérique et les cendres

© Frédéric Pauwels

Peu de temps après leur concert sur la Main Stage de Werchter, une irrésistible collection de tubes bien accueillis sans non plus retourner la plaine (la concurrence The XX? Le public majoritairement flamand?), Deck D’Arcy (basse) et Christian Mazzalai (guitare) de Phoenix s’arrêtent pour une interview express.

Peu de temps après leur concert sur la Main Stage de Werchter, une irrésistible collection de tubes bien accueillis sans non plus retourner la plaine (la concurrence The XX ? Le public majoritairement flamand ?), Deck D’Arcy (basse) et Christian Mazzalai (guitare) de Phoenix s’arrêtent pour une interview express.

Si on vous met un flingue sur la tempe juste avant de monter sur scène, vous préférez quoi? Enfiler un maillot de l’équipe de France ou vous faire accompagner par un joueur de vuvuzela?
Deck D’Arcy. Moi je prends le vuvuzela. Ca reste de la musique. Et la note, c’est un la.
Christian Mazzalai. Le sport, ça me touche pas. Perso, je n’ai jamais eu le sentiment de devoir prendre garde à ce que je fais ou dis parce que je représente la France. On a toujours enregistré des albums dans notre coin. Nous ne sommes redevables de rien.

Vous êtes plutôt Saturday Night Live sur NBC ou mardi et vendredi sur France 2 et France 4 en différé avec Nagui?
D.D’A. Vous êtes vicieux.
C.M. Disons que le Saturday Night Live est plus exotique. Je pense que ça a eu un impact sur notre succès aux Etats-Unis. En plus, ça dure quatre jours avec les répétitions. Tu sens monter la pression et c’est en direct.
D.D’A. Tout le monde a du mal à s’imposer là-bas. Il y a très peu d’Anglais. Il n’y a que des Ricains. Et au Royaume-Uni, c’est l’inverse.
C.M. Nous, c’est avec notre album le plus européen que nous marchons le mieux. Ca a quelque chose de mystérieux. Nous n’avons pas du tout recherché le succès.
D.D’A. En terminant le disque, on s’est même dit que c’est celui qui en aurait le moins. Quand nous avons commencé à le faire écouter, les gens étaient pas super excités. Nos amis appréciaient mais ne semblaient clairement pas renversés. En même temps, on adorait ce qu’on avait fait. Comme nous sommes assez sûrs de nous, nous avons résisté.
C.M. On avait comme passé un pacte. En se disant que si les autres n’aimaient pas, ils avaient tort quelque part. Et que ça en séduirait bien quelques-uns.
D.D’A. A mon avis, le genre un petit peu à côté de la plaque a séduit.

Vous êtes plus Mozart, mort à 35 ans, endetté malgré ses succès, ou plutôt Liszt, séducteur avant d’embrasser une carrière religieuse et de s’éteindre à 75 balais?
D.D’A. On n’a pas trop envie d’y passer dans les prochains mois, donc on va dire Liszt. Le titre de notre album (Wolfgang Amadeus Phoenix) et du single Lisztomania ne sont aucunement le signe d’une influence musicale. Ils sont plutôt le symbole d’une culture européenne. Cette culture dont on prend pleinement conscience quand on rentre de tournées. On a choisi des personnalités très évidentes de la musique européenne. En même temps, ça va peut-être vous étonner, tout le monde ne connaissait pas le prénom de Mozart. Une infime partie des gens n’a pas capté la référence.

Où les membres de Phoenix disperseraient-ils leurs cendres?
C.M. Je peux pas penser à ça. La mort, ça me fait flipper. Je suis un peu traumatisé.
D.D’A. Et moi, je suis pas très cendres comme mec.

Vous êtes par contre très cinéma. Vous avez participé à la bande originale de Somewhere, le nouveau Sofia Coppola (la moitié du chanteur de Phoenix Thomas Mars)?
D.D’A. Nous avons composé quelques titres en effet. C’est vraiment très minimal. On ne peut pas parler de nouvelles chansons. Il s’agit d’une musique exclusivement imaginée pour le film. On se rapproche même presque de sound designers. Avec des morceaux qui peuvent se résumer à une note.
C.M. C’est super excitant. Nous n’avions jamais fait ça. Nous avons par exemple dû trouver une musique qui colle avec le moteur d’une Ferrari. Nous devions nous montrer les plus légers et subtils possible.

Une petite apparition à l’écran comme dans Marie-Antoinette?
D.D’A. Pas cette fois-ci mais on s’est davantage impliqué dans la musique. Nous sommes passés un jour sur le tournage. Par hasard. Ca parle de la solitude d’un acteur à Hollywood. On est un peu nul pour résumer ce film mais il est super.

Lost in translation évoquait déjà brillamment le sentiment de solitude. Mais dans les hôtels à l’autre bout du monde…
C.M. Tout le monde se prend la même chose dans la figure au Japon. Nicolas Godin de Air m’avait prévenu à l’époque. « Elle a réalisé un film formidable sur ce sentiment d’être complètement déphasé, seul dans sa tête. »

Que se passe-t-il dans vos têtes justement? Quels sont vos projets?
C.M. Nous allons tourner jusqu’à l’automne. Notamment sur la côte ouest des Etats-Unis. Puis, nous allons nous mettre à bosser sur un nouvel album. On ressent plus cette envie là que celle de souffler. Peu de choses naissent sur la route. Juste des idées floues. On ne les concrétise pas. Dans notre histoire, ça a toujours été des échecs. Pour Wolfgang Amadeus Phoenix, nous avons composé mille petits bouts de morceaux. Des ébauches de 10 secondes. C’est un hallucinant travail d’archivage. On a tout gardé.

Propos recueillis par Julien Broquet, à Werchter

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