Critique

[Le film de la semaine] Greta, de Neil Jordan: la dame au sac à main

Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

THRILLER | Isabelle Huppert inquiète et terrifie dans un thriller tordu signé Neil Jordan.

Un sac à main classique, élégant, oublié sur un siège dans le métro new-yorkais. Une jeune fille s’en saisit, après une courte hésitation. Frances (Chloë Grace Moretz) est nouvelle à Manhattan. Serveuse dans un restaurant de luxe, elle ne connaît pas grand monde hormis Erica (Maika Monroe), sa colocataire. Laquelle aurait bien gardé le sac, ou du moins l’argent. Mais Frances est honnête, et fera le long chemin vers la maison de la propriétaire distraite, pour lui rendre au plus vite l’objet oublié. Greta (Isabelle Huppert) l’accueillera très aimablement. Entre la veuve pianiste, dont la fille vit au loin, et une Frances qui n’a pas encore su faire le deuil de sa mère, une relation d’amitié va commencer. Une relation qui pourrait bien se refermer comme un piège sur l’encore candide jeune fille… Car nous sommes dans un thriller. Et signé Neil Jordan, dont on sait qu’il aime donner au film de genre les couleurs les plus vénéneuses! Avertissement aux amateurs de frissons qui s’en réjouiront. Mais aussi aux natures sensibles, claustrophobes, dont les nerfs ne seront pas ménagés. Car avec une intrigue à la fois (relativement) simple en surface et joliment tordue dans son sous-texte pervers, le réalisateur de The Company of Wolves et de Interview with the Vampire sait bien jusqu’où aller trop loin…

[Le film de la semaine] Greta, de Neil Jordan: la dame au sac à main

Huppertissimo

Écrit en collaboration avec un spécialiste du film d’horreur, Ray Wright, Greta cherche et trouve son inspiration dans une dimension clairement hitchcockienne. Croisant les rythmes trépidants de la mégapole d’aujourd’hui et des échos assourdis de mystère Mitteleuropa, il offre à Jordan un assez riche potentiel de couleurs contrastées, de moeurs contradictoires. Le cinéaste peut compter sur son directeur de la photographie nord-irlandais Seamus McGarvey pour soigner la palette et enrober le récit d’une lumière fascinante. Mais l’atout numéro un du film est son interprétation. Celle d’une Chloë Grace Moretz rendant bien les béances d’une vie qui se cherche entre adolescence et âge adulte. Et surtout celle d’une Isabelle Huppert une fois de plus surprenante. Vous croyiez avoir tout vu de l’actrice française avec son personnage extraordinaire dans Elle de Paul Verhoeven? Eh bien non! Greta est l’occasion pour la Parisienne d’investir le domaine de l’épouvante gothique. Et le moins qu’on puisse écrire est qu’elle y trouve sa place, avec une création d’abord tout en nuance, puis évoluant vers une lente mais sûre plongée vers la folie meurtrière. Terrifiante, la Huppert! Dans un film de genre tout à la fois modeste et captivant. Un film au féminin, aussi, comme l’était le précédent de Neil Jordan, Byzantinium, chronique vampirique menée par les formidables Gemma Arterton et Saoirse Ronan.

De Neil Jordan. Avec Isabelle Huppert, Chloë Grace Moretz, Maika Monroe. 1h38. Sortie: 12/06. ***(*)

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