Critique

A Simple Life

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Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

MÉLODRAME | La cinéaste hongkongaise Ann Hui signe un drame sobre et émouvant autour du lien unissant un homme dans la fleur de l’âge et sa domestique vieillissante. Avec Deanie Ip, magnifique.

Mélodrame de Ann Hui. Avec Deanie Ip, Andy Lau, Qin Hailu. 1h57. Sortie: 22/08. ***

Certes, l’ouverture du film, soulignée à grand renfort de voix off et de musique poussive, laisse redouter le pire. Crainte vite dissipée, toutefois: il y a dans A Simple Life, dernier film de Ann Hui, l’expression d’une vérité à la fois émouvante et paisible, comme si la cinéaste hongkongaise avait su prendre, à travers cette histoire, la mesure du temps qui passe et de la vie qui s’écoule avec lui, en toute simplicité.

Au coeur du propos, Ah Tao (Deanie Ip, magnifique, et justement récompensée du prix d’interprétation à Venise en 2011), orpheline entrée, quelque 60 ans plus tôt, au service d’une famille qu’elle a accompagnée, génération après génération. Entre elle et Roger (Andy Lau, impeccablement sobre -au point, d’ailleurs, d’être toujours pris pour un autre), son jeune employeur, un homme évoluant dans l’industrie du cinéma et par ailleurs le dernier des siens resté à Hong Kong, la relation tient en apparence de la routine, peuplée de gestes que l’on remarque à peine, avec toutefois ce petit quelque chose d’indicible en sus. Un lien rare et précieux, en somme, bientôt mis à l’épreuve de l’existence lorsque, victime d’une attaque, Ah Tao ne demande pas seulement à prendre sa retraite, mais aussi à être placée dans une maison de repos. Les rôles s’inversent alors, tandis que Roger entreprend de veiller au (ré)confort de la vieille dame, parachutée dans un environnement inconnu, passablement excentrique à sa façon. Et de prendre, insensiblement, la mesure du rapport privilégié les unissant.

L’air de rien

Cinéaste phare de la nouvelle vague hongkongaise -ses débuts remontent à la toute fin des années 70, avec The Secret, et on lui doit notamment Boat People et autre Zodiac Killer-, Ann Hui s’est inspirée d’une histoire vraie pour signer A Simple Life. Mélodrame classique, le film s’en tient, de prime abord, à la simplicité affirmée dès son titre, explorant cette relation pour s’insinuer, sobrement, au coeur des méandres de l’existence -un quotidien appréhendé en mode doux-amer. L’art de la réalisatrice tient, naturellement, à la justesse du ton adopté, qui exclut le pathos comme la mièvrerie, et laisse poindre diverses aspérités. Ainsi de cette ironie tendre et lucide qui sous-tend le récit, mais encore de l’humour aiguisé qui l’anime dès lors qu’il s’immisce dans le monde du cinéma (le cameo de Tsui Hark est un régal), là où l’ensemble se dévide, l’air de rien, comme une parabole sur la solitude.

Balayé encore d’un souffle délicatement mélancolique, A Simple Life trouve, tout en pudeur, les accents d’une poignante humanité. Pour être modeste en apparence, le film n’en produit pas moins une impression singulièrement pénétrante…

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