Critique

À la télé ce soir: Gatsby le Magnifique

Leonardo DiCaprio dans Gatsby le Magnifique © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

Baz Luhrmann s’approprie lumineusement le classique de F. Scott Fitzgerald, dont il restitue l’ampleur romanesque et visionnaire, les paillettes y ouvrant sur l’abîme, en trois dimensions…

On l’a longtemps attendue, cette adaptation par Baz Luhrmann (Moulin Rouge, Australia) de The Great Gastby, roman écrit par F. Scott Fitzgerald entre 1923 et 1924, un classique déjà porté trois fois à l’écran, dont la dernière, en 1974, par Jack Clayton, avec Robert Redford dans le rôle-titre. Si sa version de Romeo + Juliet avait pu bluffer par son abord audacieux, le cinéaste australien s’en tient cette fois à une approche fidèle de l’ouvrage du romancier américain. Vue à travers le regard de Nick Carraway (Tobey Maguire), jeune homme du Midwest débarqué à New York à l’orée des années 20 pour faire son trou dans la finance, c’est là l’histoire de Jay Gatsby (Leonardo DiCaprio), son voisin de West Egg, Long Island, un millionnaire au passé nébuleux et au train de vie somptueux. L’objet, et pour cause, de rumeurs diverses, tant de faste ne masquant qu’à grand peine une faille profonde, en un mystère que les faits viendront éclairer de jours multiples.

Plus c’est grand, plus c’est intime

S’appropriant la vie de Gastby dans son style personnel, dont les outrances sont à la démesure même du personnage, Luhrmann a aussi veillé à restituer au plus près l’univers de Fitzgerald et son époque, ces folles années 20 dont l’apparente opulence cache une instabilité économique et une fêlure plus fondamentale, toute ressemblance avec les temps présents n’étant, en l’occurrence, nullement fortuite. Si l’on devine dans cette résonance contemporaine l’élément ayant attisé l’intérêt du réalisateur, ce dernier a aussi réussi la gageure de transposer cette équipée littéraire dans sa dimension visionnaire et romanesque à la fois. Débutant dans le faste des soirées mondaines et le dégoulinement des paillettes, The Great Gatsby dévoile bientôt un arrière-plan plus amer, ouvrant sur l’abîme de destins inachevés, en une vision intensément romantique autant que tragique. Cette histoire, où la grandeur tutoie la médiocrité, est aussi celle d’amours impossibles et de rêves d’absolu fracassés, en effet, la fantasmagorie s’y effaçant alors au profit de la mélancolie.

Chemin faisant, Luhrmann emprunte à Fitzgerald l’une des clés de son cinéma, voulant que plus c’est grand, plus c’est intime -un postulat déjà à l’oeuvre dans Australia et dont il apporte la lumineuse démonstration dans cette oeuvre-tourbillon. Pour autant The Great Gatsby n’est pas exempt de tout reproche, le premier tenant au recours à une 3D qui, sans être exagérément intrusive, tend à poser un voile d’ombre sur la première partie, effervescente, du film. Un comble pour un cinéaste dont l’univers s’appuie traditionnellement sur l’exubérance visuelle, et dont l’instinct décoratif se déploie parfois ici au détriment de la consistance des personnages. Ce sentiment, toutefois, s’estompe sur la distance, pour laisser place à une réflexion où se rejoignent auteur et cinéaste: « C’est ainsi que nous avançons, barques à contre-courant, sans cesse ramenés vers le passé. » Jusqu’à nous y consumer…

DRAME DE BAZ LUHRMANN. AVEC LEONARDO DICAPRIO, CAREY MULLIGAN, TOBEY MAGUIRE. 2013.

Ce lundi 14 septembre à 20h25 sur La Une.

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