Critique

[à la télé ce soir] Al Pacino: le Bronx et la Fureur

© Michael Ochs Archive / Getty Images
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Passionnant, nourri par les commentaires audio du principal intéressé, Le Bronx et la Fureur évoque la brèche qu’il ouvre pour quelques Italo-Américains (De Niro, Travolta, Pesci, Stallone).

1970, New York en décrépitude est gangrené par l’héroïne. Des dizaines de milliers de junkies arpentent les rues de la ville en quête de leur prochaine dose. Un film au réalisme cru est en fabrication à la croisée de Broadway et de la 72e. Panique à Needle Park dépeint une chute dans l’enfer de la dépendance. À la fin du tournage, l’acteur encore inconnu qui en tient le rôle principal n’arrive pas à sortir de son rôle. Il passe du temps avec les junkies du Parc de la Seringue et renonce à s’en aller présenter le film au festival de Cannes… Cet Italo-Américain rescapé du Bronx et sauvé par le théâtre, ce comédien qui deviendra l’un des plus grands acteurs de sa génération, incarnation de New York, de ses marges et ses démons, n’est autre qu’Al Pacino. Jean-Baptiste Péretié (qui a déjà tiré les portraits de John Wayne, Jacques Tati et Buster Keaton) raconte un gamin qui a grandi dans un appartement trop petit avec sa mère ouvreuse. En rentrant du cinéma, il rejoue tous les rôles du film qu’il vient de voir. Il commence à fumer dès l’âge de 9 ans et à picoler quatre ans plus tard. Aussi loin qu’il se souvienne, l’herbe et l’alcool ont fait partie de sa vie. Bouleversé par la prestation de Marlon Brando dans Sur les quais, il rêve de devenir acteur. Il se frotte au théâtre expérimental, joue dans les cafés de Greenwich Village et entre à l’Actors Studio à 26 ans, lors de sa deuxième tentative. Lee Strasberg devient un père de substitution et lui transmet les principes de la Méthode (comment devenir le personnage et non pas le jouer) en puisant dans ses blessures intimes. Le jeune homme, trop petit et basané, qui se shoote aux monologues de Shakespeare, ne plaît pas aux patrons de la Paramount qui veulent une star pour Le Parrain. Mais Coppola finit par avoir gain de cause. En toute discrétion, Al ira jusqu’à rencontrer des membres de la pègre new-yorkaise pour préparer son rôle. Pas prêt à affronter les affres du succès, il retourne au théâtre. Puis s’engage dans Serpico, histoire vraie racontant une police new-yorkaise rongée par le racisme et la corruption. À l’époque, les touristes reçoivent un guide de survie. « Ne prenez jamais le métro. Ne sortez jamais après 6 heures du soir. Si vous le pouvez, ne restez pas dans cette ville. »

Passionnant, nourri par les commentaires audio du principal intéressé, Le Bronx et la Fureur évoque la brèche qu’il ouvre pour quelques Italo-Américains (De Niro, Travolta, Pesci, Stallone). La spirale dépressive et le mec qui se perd dans l’alcool. L’acteur qui a refusé Star Wars, Les Moissons du ciel, Apocalypse Now et est annoncé à plus de 80 piges dans trois nouveaux films.

Al Pacino: le Bronx et la Fureur

Documentaire de Jean-Baptiste Péretié. ****

Dimanche 06/02, 23h20, Arte.

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