Critique | Séries

The Other Black Girl: une critique sociale redoutablement efficace qui mêle comédie et horreur

3,5 / 5
© disney+
3,5 / 5

Titre - The Other Black Girl

Quand et où - Disney+

Critique sociale du monde du travail, de son racisme et de son sexisme, The Other Black Girl ose le mélange des genres entre comédie et horreur.

Jeune femme brillante et ambitieuse, Nella Rogers (Sinclair Daniel) a décroché un boulot d’assistante auprès de la prestigieuse maison d’édition Wagner Books, à New York. Elle a pour patronne la pétulante Vera (formidable Bellamy Young), incarnation du privilège blanc qui hante les couloirs de la boîte et cache plus ou moins mal, derrière ses promesses de reconnaissance et de promotion, un gentil racisme bon teint. Nella ne semble pas en prendre ombrage, d’autant que l’arrivée dans son sillage, et dans le bureau voisin, de Hazel (Ashleigh Murray), autre jeune Afro-Américaine, laisse entrevoir la possibilité d’une alliance. Sauf que les choses ne vont pas se passer exactement comme elle l’attend, Hazel déployant davantage les caractéristiques de la Némésis disruptive que de la consœur solidaire. Pour peaufiner le tout, Nella doit se coltiner un auteur d’une beaufitude finie (Brian Baumgartner, à mille lieues de son rôle de Kevin dans The Office).

Jusque-là, The Other Black Girl, adapté du roman de Zakiya Dalila Harris (qui cosigne la série), emprunte brillamment les codes de la comédie de bureau, abordant l’aliénation au travail sur fond de racisme et de misogynie. Portée par un casting virevoltant et des intrigues relationnelles soignées, la série semble indiquer, avec un sens aigu du commentaire social, que même dans un milieu supposé progressiste -l’édition-, les privilèges et les mécanismes de domination persistent. Ils s’inscrivent dans de micro- agressions, des actes de dénigrement, des propos et des attitudes infantilisants ou abreuvés de stéréotypes et de hiérarchisation entre les humains. Et puis, très vite, des événements étranges et surnaturels surviennent, reliant Nella à une ancienne employée de la maison, noire elle aussi, Kendra Rae Phillips, qui dans les années 80 œuvrait pour la romancière activiste Diana Gordon avant de mystérieusement disparaître, pour mieux réapparaître sous forme d’entité lanceuse d’alerte. La série glisse alors allègrement vers l’horreur, une recette qui rappellera peut être The Underground Railroad ou Lovecraft Country. Mais sa transition brutale, de la critique subtile du monde corporate vers le surnaturel horrifique, range davantage The Other Black Girl dans la catégorie du réalisme magique. C’est un peu déroutant et pourtant redoutablement efficace. Les apparitions de l’entité qui hante désormais les murs et les écrans de Wagner sont un rappel permanent des dangers qui guettent Nella et Hazel et de cette phrase prononcée en 1975 par l’écrivaine Toni Morrisson: “Le racisme est une distraction qui vous empêche de faire votre boulot.

Une série créée par Zakiya Dalila Harris et Rashida Jones. Avec Sinclair Daniel, Ashleigh Murray, Brittany Adebumola. Disponible sur Disney+.

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