Staff Benda Bilili, groove au-delà de l’éphémère

Ce dimanche aux Nuits Botanique, le Staff Benda Bilili donnait une leçon de groove dans un Cirque malheureusement peu rempli.

Même pas mille personnes pour un Cirque Royal medium: le score un brin décevant est aussi celui de la world au public fluctuant. À moins que ce ne soit le statut particulier du Staff décidant d’une carrière atypique chez les musiciens des pays en voie de développement. Surtout quand ceux-ci sont partis avec un premier album-fusée -le bien nommé Très très fort sorti au printemps 2009- et un délire médiatique partagé entre l’estime sincère pour ce barbecue rythmique des rues de Kinshasa, et le statut d’infirmes des deux-tiers du groupe. La rumba en chaise roulante n’étant pas dans le cas présent, un affre (douteux) de marketing, mais la conséquence d’une poliomyélite qui frappe encore ce coin d’Afrique. Le film documentaire sur l’épopée de ces héros peu orthodoxes (Benda Bilili) participera aussi à un succès gagnant jusqu’aux États-Unis et au Japon.

Alors, une fois la brise médias calmée, que reste-t-il? Un exceptionnel groupe de scène qui, contrastant avec la performance molle de Charlotte Gainsbourg la veille au même endroit, incarne pleinement la machine à groove. Si James Brown est indémodable, pourquoi le Staff ne le serait-il pas? Et pas seulement parce que l’un des quatre gars en fauteuil -Coco Yakala Ngambali- présente une tignasse compatible avec la pompadour de feu le Grand James…Tout dans cette musique basée sur la chanson congolaise, est hérissé d’un sens onctueux de la danse, le champignon funky surgissant brusquement entre deux coulées de sentimentalisme dragueur ou d’un hymne au travail. À l’instar d’Osali Mabe, extrait du second album prévu pour septembre. Toujours produit par l’excellent Vincent Kenis pour Crammed Discs, ce disque témoignerait, d’après le manager Michel Winter -qui monte en scène présenter les cocos- de l’actuelle tenue scénique des huit Staff.

Un peu plus de boucan et même, hier au Cirque, quelques bribes électro-technoïdes dopant les rumbas ancestrales. La force du Staff tient autant dans ses harmonies vocales paradisiaques que dans les sons couinants du satonge, boîte de conserve chatouillée par un arc en bois supportant un bout de corde de guitare. Son manipulateur, Roger Landu, benjamin du groupe, en tire des vagissements bizarres, à la fois sensuels et dissonants. C’est -forcément- très très fort et il n’y a aucune raison que les performances du Staff, ravissant le dimanche soir bruxellois, ne soient tributaires d’une quelconque mode ou empathie. Leur musique groove au-delà de la polio et de l’éphémère.

Philippe Cornet

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content