Pedro Winter à Dour pour fêter les 20 ans de son label Ed Banger

Pedro Winter, capitaine à la barre depuis 20 ans d'Ed Banger. © AFP via Getty Images
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

À côté de l’événement Aphex Twin, l’une des autres têtes d’affiche électronique du festival de Dour sera Pedro Winter. Le patron viendra fêter les 20 ans de son label Ed Banger. Discussion avec un éternel enthousiaste.

Vingt ans, cela se fête. Même pour un esprit aussi peu porté sur la nostalgie que celui de Pedro Winter. “Oui, quand même. Parce que si vous regardez bien, au bout du compte, il n’y a pas des milliards de labels français ou même internationaux qui atteignent ce cap. A fortiori des labels électroniques. Et encore moins qui ont pu marquer une génération et, j’espère, être encore pertinents, tout en conservant la même intégrité artistique. C’est précieux.” Pour l’occasion, l’enseigne parisienne a prévu une tournée anniversaire (qui passera donc par Dour), des rééditions, une compilation (Support Your Local Record Label). Récemment, les éditions Séguier ont également publié Ed Banger Records – Une histoire des musiques électroniques françaises, écrit par Julia Pialat.

Il y a cinq ans, Ed Banger avait également marqué son anniversaire en réinterprétant quelques-uns des titres les plus emblématiques de son catalogue en version symphonique. Dont une revisite orchestrale du Pocket Piano de DJ Mehdi. Entre-temps, le morceau est devenu le générique de C ce soir, sur France 5, l’une des meilleures émissions du PAF. “Karim Rissouli (présentateur de C ce soir, NDLR) habitait dans la rue du bureau. On se croisait souvent. C’est vraiment un journaliste brillant. Alors quand il m’a dit qu’il adorait le morceau et qu’il aurait bien voulu l’utiliser pour le générique, j’ai tout de suite dit oui.

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Héros French touch

L’anecdote dit beaucoup du mode de fonctionnement d’Ed Banger. Un nom qui a réussi à maintenir l’image d’un label accessible. Une maison, où la spontanéité est essentielle, et le sens de la proximité naturel. À l’instar de ses bureaux, installés dans une petite rue de Montmartre, donnant directement sur le trottoir. C’est de là, dès 2003, que celui qui est encore à l’époque manager de Daft Punk va démarrer l’une des plus belles success stories de la musique électronique.

Y participeront notamment Mr. Oizo, Cassius, Uffie, SebastiAn, Breakbot, DJ Mehdi et évidemment, Justice. Dans la foulée de la fameuse French Touch, Ed Banger va contribuer à placer la France sur la carte du music business mondial. Issu des cultures alternatives, il va aussi être parmi les premiers à jouer le jeu des marques. Autant pour alimenter les caisses que pour s’en servir comme canal de promotion pour ses artistes, “tant que ça reste créatif.

En outre, Ed Banger fait aussi partie de ceux qui refuseront de voir uniquement le Net comme un repaire de pirates, minant l’industrie à coups de téléchargements illégaux. Mais aussi comme un levier potentiel, investissant très vite les réseaux sociaux. “Sur MySpace, par exemple, on se montrait tel qu’on était, on racontait des conneries, on répondait aux messages, et surtout, c’était vraiment nous derrière…

© National

Turbine

Le label parisien devient aussi très vite le symbole d’une musique maximaliste, à l’énergie brute, presque punk. On parle alors de “turbine” pour désigner cette électro très frontale et tapageuse. Vingt ans plus tard, l’image colle toujours à la peau d’Ed Banger. “C’est vrai qu’il y a encore cette idée chez certains qu’on est le label d’un seul son. Alors que si vous écoutez Mr. Flash, Cassius, Mickey Moonlight, etc., vous verrez que la proposition musicale est très diversifiée. Mais en même temps, j’assume ce biais. Je suis même content de ça. Que les gens pensent qu’Ed Banger ne fait que de la musique “bourrin”, ça me va. Parce qu’au final, c’est aussi ma réussite -ou mon erreur, c’est selon- que la marque Ed Banger soit devenue aussi puissante qu’un artiste. Sans que ça ait été un plan précis dès le départ. ça s’est juste construit de cette façon-là.

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Pedro Winter a lui-même largement contribué à la construction de cette image. Comme ses modèles avoués -Mo’ Wax, Factory-, Ed Banger est incarné par une figure marquante.Je sais que je représente ce “personnage” d’Ed Banger. Quand So Me (graphiste historique de la maison, NDLR) a commencé à bosser sur l’identité visuelle, il a toujours dit qu’il avait besoin de personnifier le label. Et comme il aimait bien me caricaturer, c’était chaque fois ma gueule. Ce qui m’a toujours fait marrer. Et puis, ça me permettait aussi de brouiller les pistes. Je suis à la fois Ed Banger, Pedro Winter, ou Busy P quand je mixe…

Label multigenre

Le point commun entre ces différents personnages étant une capacité à rassembler et un enthousiasme contagieux. Vingt ans après les débuts d’Ed Banger, ces qualités sont visiblement toujours d’actualité. Certes, le label n’est plus aussi “décisif” qu’au cours des années 2000. Mais ses dernières sorties -la sunny pop de Myd, le rap charnu de Varnish La Piscine- prouvent qu’il a toujours faim de nouveautés. Et ce, sans se borner à une seule esthétique ou un seul genre. À un moment où “on a parfois l’impression que la musique dans les clubs est de nouveau très compartimentée”, ce n’est pas anodin…

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Dour operator

Cinq jours de festival, près de 400 artistes, répartis sur pas moins de huit scènes… Du 12 au 16 juillet, Dour deviendra à nouveau le centre névralgique des musiques alternatives (et apparentées). Parmi les grosses cartouches de cette édition 2023, on peut citer Damso, Orelsan, Lomepal, Phoenix, Caribou et, évidemment, Aphex Twin, pour l’une de ses rares apparitions scéniques. Et puis, donc, la venue de Pedro Winter pour fêter les 20 ans d’Ed Banger.

Le patron viendra solo, avec ses disques pour brasser dans le catalogue maison, avec un “mégamix de plus ou moins 35 morceaux”. Attendu sur l’immense Balzaal, Pedro Winter viendra quand même accompagné d’un VJ pour les images, raccord avec un label qui a toujours été attentif au rapport entre musique et visuel. “De toutes façons, à Dour, je sais que ça va bien se passer, j’y vais à l’aise.

Pedro Winter est en effet un habitué de la maison. La première fois, c’était en 2007, avec DJ Mehdi, Feadz, etc. “Je m’en rappelle très bien. C’était un moment fabuleux parce qu’on a pu vraiment voir les publics se croiser. On ramenait des rappeurs dans une tente électro pour un set qui ressemblait par moments à un concert de metal. C’était un peu la rencontre du 3e type. Puis, je pense aussi qu’on amenait sur scène quelque chose de différent. à cette époque-là, vous tombiez souvent sur des DJ qui jouaient de la minimale en tirant la tronche. Nous, on débarquait en se crachant de la bière au visage, en portant Uffie sur nos épaules. Il y avait un truc très déconnant et festif.” Pour le coup, complètement aligné avec l’esprit du Dour festival…

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