Le dernier Clash de Joe Strummer

Joe Strummer, ici au festival Glastonbury en 1999. © REUTERS
Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Timing cruel pour le chanteur de Clash, foudroyé par une crise cardiaque alors qu’il s’apprêtait à reformer le légendaire groupe de punk-rock anglais pour une apparition au Rock Hall Of Fame à New York en mars!

La mort – par overdose – de Sid Vicious le 2 février 1979 ne nous aura pas vraiment secoués puisqu’elle mettait un point final logique à un parcours autodestructeur. En revanche, la disparition de Joe Strummer, le dimanche 22 décembre, à l’âge de 50 ans, a une tout autre signification émotionnelle et culturelle.

Côté sentiment, Clash représente d’abord une poignée de disques électriques qui redéfinissent le rock de la fin des années 1970 comme une musique urgente et dégraissée, férocement engagée dans son époque. Un électrochoc de jeunesse qu’on verra une demi-douzaine de fois sur scène, en Belgique et à Londres. Joe Strummer en sueur, la voix toujours au bord de la rupture, entouré de ses amis Mick Jones, Paul Simon et Topper Headon. On a vite compris que la pérennité de Clash s’inscrit dans l’histoire par la grandeur de ses chansons, de Complete Control à Somebody Got Murdered, de Train in Vain à Stay Free. Un mélange intense de rythmes blancs et reggae et de textes aux allures de protest-songs cadrés dans l’Angleterre déclinante des années 1970-1980.

Fils de fonctionnaire aux affaires étrangères, Strummer – John Graham Mellor de son vrai nom – décidera très jeune qu’Elvis et Woody Guthrie sont plus essentiels que la représentation monochrone de la Perfide Albion. Même si son opposition à la politique conservatrice d’Outre-Manche marie un amour des théories antiracistes, tiers-mondistes, voire d’extrême gauches violentes (il portait volontiers un tee-shirt des Brigades Rouges ou de la RAF), à une anglicité profonde et irrévocable. Peu importe qu’il se soit largement trompé en virant Mick Jones de Clash, en septembre 1983, « pour rupture de l’état d’esprit initial », Strummer a toujours maintenu son intégrité artistique et financière.

Après la dissolution du groupe en 1985, Strummer a navigué entre les apparitions au cinéma, des collaborations avec les Pogues et quelques disques, dont le dernier, réalisé avec son nouveau groupe, The Mescaleros, est paru en 2001. Cet album généreux montre combien il a ouvert la voie à des chanteurs comme Manu Chao. Strummer a toujours résisté aux folles sommes d’argent offertes pour remonter Clash, mais il s’était récemment joint à Mick Jones – pour un benefit-concert à Londres – pour la première fois en deux décennies.

Clash devait apparaître au printemps pour sa consécration au Rock Hall of Fame et Strummer venait aussi d’écrire une chanson avec Bono et Dave Stewart, pour célébrer le dixième anniversaire de la libération de Nelson Mandela. Son héritage est important et ses chansons ont l’allure certifiée de fougueux classiques rock nourris des turbulences politiques et sociales du monde.

On peut écouter sa dernière ouvre avec The Mescaleros, l’excellent Global A Go-Go

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