Chamfort/Duvall, « une amitié qui perdure au-delà de la collaboration »

Alain Chamfort © JULIEN MIGNOT
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Toujours aussi dynamique, le festival Francofaune a donné carte blanche à Alain Chamfort et Jacques Duvall pour chanter leurs tubes et raconter la magie de leur association sur scène, à Bruxelles et La Louvière. Entretien.

Quand on l’appelle, le binôme est encore splitté, chacun à un bout de l’écran vidéo. « A quoi ressemblera la soirée? Ah ben, ça, à vrai dire, on n’en sait encore rien nous-même! Il risque d’y avoir pas mal d’impro », rigole Jacques Duvall. Le camarade Alain Chamfort confirme: « C’est quelque chose que l’on n’a jamais fait. On n’a pas trop de repères. Ce qui est très excitant. L’idée est de rassembler nos souvenirs. Il est prévu que je chante, Jacques aussi d’ailleurs » « Oui enfin, un ou deux titres, max », freine l’intéressé. « Tu te défiles, hein. De toute façon, on a l’après-midi pour répéter. » « Euh non, Alain, la répétition, c’est la veille. » « Ah oui? OK… »

Chez d’autres, ces hésitations pourraient interpeller. Avec le duo Chamfort-Duvall, pas de quoi paniquer. Les deux se connaissent par coeur. Bien décidé à ne pas se laisser abattre par la Covid, le festival Francofaune a choisi de les mettre à l’honneur lors de deux soirées spéciales, à Bruxelles et La Louvière (1). Entre deux chansons, réarrangées pour l’occasion par Boris Gronemberger (River Into Lake, Girls In Hawaii…), Alain Chamfort et Jacques Duvall évoqueront la genèse de leurs tubes, les coulisses de leur amitié de près de 40 ans.

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La première collaboration date en effet de 1981 – le titre Paradis, sur l’album Amour année zéro. Le chanteur-compositeur explique: « En fait, la première fois, on ne s’est pas beaucoup vus. J’étais avec Wanda (NDLR: alias Lio), à Los Angeles, où j’enregistrais l’album. Je travaillais alors avec Serge Gainsbourg. A un moment, il a décidé de reprendre une chanson, Souviens-toi de m’oublier. » Il la refilera à Catherine Deneuve. En attendant, il manque à Chamfort un titre pour boucler son disque. « On s’est quittés un peu fâchés… J’avais encore besoin d’un texte. Wanda m’a alors proposé de demander à Jacques. Il a envoyé deux propositions, j’en ai gardé une. »

Jacques Duvall
Jacques Duvall© PIERRE TOMBAL

Fin, momentanée, de l’histoire. Elle reprendra cinq ans plus tard, à la faveur de l’album Tendres Fièvres. Cette fois, c’est Marc Moulin, coproducteur du disque, qui sert d’intermédiaire. Jacques Duvall: « C’est grâce à lui qu’on a commencé à se rapprocher, même si on ne parle pas encore de complicité. » Duvall signe les paroles de cinq des neuf titres du disque, dont celui de La Fièvre dans le sang. Ce n’est que sur l’album suivant, Trouble, qu’il prend tous les textes à son compte. Alain Chamfort: « Contrairement à ce que je pouvais vivre professionnellement à Paris, j’avais la chance incroyable d’être entouré par ces deux garçons qui m’ont porté vers une certaine « maturité ». » Même s’il est alors déjà une superstar, grâce notamment au carton de Manureva ? « Oui. Quand je suis arrivé à Bruxelles, j’étais encore très incomplet. Tout ce que j’avais fait avant était finalement resté assez hasardeux. La rencontre avec Gainsbourg, par exemple, partait d’abord d’une envie de faire appel à quelqu’un que j’admirais, qui allait m’amener des textes autrement bien écrits, et, quelque part, une forme de crédibilité. Mais cela n’a jamais été aussi loin que la collaboration avec Jacques et Marc. Et puis, je n’apparaissais pas trop non plus. Quand Gainsbourg me fait chanter Bambou, c’est son histoire, pas la mienne. »

Humainement aussi, on a réalisé qu’on avait pas mal de points communs.

Jacques Duvall

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Nous ne pouvons pas résister à vous affirmer que ces deux-là seront démasqués demain sur la scène de l'Atelier 210…
⭐️⭐️⭐️

Geplaatst door FrancoFaune op Dinsdag 6 oktober 2020

rich1.0https://www.facebook.com/festivalfrancofaune/posts/3368623323215602552

Dandy pudique

Alain Le Govic ne devient donc vraiment Chamfort, dandy vulnérable aux mélancolies arsenic, qu’à partir du moment où il peut enfiler le costard taillé par Jacques Duvall. Entre ces deux réservés, le temps a fait son office, les barrières sont tombées. « A force, on a commencé à projeter un personnage. Qui n’est pas totalement moi, ni tout à fait Jacques, mais une espèce d’hybride. Je l’ai toujours trouvé plus intéressant que je ne le suis. » Comment le résumer? « Un garçon qui laisse apparaître ses fragilités, les revendique même, tout en gardant une posture très contrôlée, ne dévoilant jamais tout à fait ses sentiments. »

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Le genre de lover loser magnifique, qui ne fait même pas semblant de cacher ses défauts et ses vices. Une anomalie dans un paysage musical qui a l’habitude de profils plus « carrés »? Jacques Duvall: « A la base, c’est vrai que personne n’est preneur de ce genre d’histoire. Je l’ai bien vu, quand j’ai essayé d’en refiler à d’autres, un peu comme des maladies (rires). Alain, au contraire, a accepté d’incarner ce truc-là… On n’est pas dupe. Notamment sur le milieu du show-biz, fort basé sur l’image. Il y a une manière de se rendre enviable, intéressant. C’est presque le contraire qu’on a essayé de faire. » Avec, à l’arrivée, pas mal de réussite… Le « tableau de chasse » du binôme est impressionnant: de Clara veut la lune à L’Ennemi dans la glace, en passant par Souris puisque c’est grave, Le Grand Retour, L’Amour samplé, etc. Soit autant de petits bijoux d’élégance transie et d’ironie sombre. Jacques Duvall: « Au départ, je n’étais pas programmé pour faire de ça mon métier. Travailler avec un vrai chanteur, ce n’est pas ce dont j’avais rêvé. Mais petit à petit, on s’est trouvés. Artistiquement d’abord: ce que faisait Alain m’a touché de plus en plus. Humainement aussi, on a réalisé qu’on avait pas mal de points communs. Il m’a toujours beaucoup soutenu. » Alain Chamfort: « C’est une amitié qui s’est consolidée au fil du temps et qui perdure au-delà de la collaboration. Ce qui est rare. Souvent, quand vous n’avez plus de « raisons » de vous voir, vous passez à autre chose, c’est normal. Là, il y a quelque chose qui s’est scellé entre nous. »

(1) Le 7 octobre à l’Atelier 210, à Bruxelles, et le 8 octobre au Théâtre de La Louvière. www.francofaune.be

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