Angèle, le coup de Sirocco

Angèle, ici à Forest National en 2019 © Etienne Tordoir
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Lundi soir, Angèle était sur la scène de Forest National, pour la première de ses dates belges. Showtime!

En termes sportifs, c’est ce qui s’appelle « jouer dans son jardin ». Lundi soir, un peu moins d’un mois après la première (à Reims), le Nonante-Cinq Tour faisait arrêt une première fois à Forest National (elle y reviendra en décembre, à 4 reprises, sans compter un Sportpaleis et un passage au Dour festival), « à 10 minutes en voiture de Linkebeek », là où Angèle Van Laeken a grandi. Pour l’occasion, la chanteuse a d’ailleurs revêtu les couleurs nationales: jupe noire, veste jaune, bustier rouge. C’est qu’elle attendait ce moment depuis longtemps. Elle le chante sur Plus de sens: « je ne vais pas vous mentir, la vie sans vous est triste à mourir », évoquant la pandémie qui l’a privée de concerts:  logiquement, le morceau ouvre le concert.

Rincée après le tourbillon de Brol, Angèle aurait pu profiter du confinement pour respirer. Au lieu de ça, elle a surtout douté: allait-elle pouvoir un jour retrouver l’ivresse de la scène? Alors forcément, aujourd’hui que la pandémie semble s’éloigner, la prima donna pop fonce. Angèle ne chipote pas, et va au turbin. Gros son, gros light-show, chorés enlevées: le Nonante-Cinq Tour file droit. La machine est lancée, tel un wagon sur le Sirocco, emporté par les montagnes russes. Histoire de faire le plein de sensations. À défaut toujours d’émotions? Y a du stress aussi là-dessous – « ça va, Bruxelles? », sur le même ton que la veille « ça va, Montpellier/Lille/Marseille? ». Mais surtout une grosse envie. Même si elle a parfois du mal à lâcher prise, Angèle s’amuse sur scène, ça se voit.

Le live redonne même de l’épaisseur à des titres du dernier album qui avaient pu passer inaperçus – au hasard, Tempête à la mise en image assez bluffante, ou Profite et ses mouvements élégants. Certes, le côté bubblegum de Brol a été un peu gommé. Il y a bien des images de Pépète le chien volant sur une pizza (sur Oui ou non) ou un ballet des gaufres de Liège et de Bruxelles sur le final de Bruxelles je t’aime. Mais pour le reste, le show a perdu en légèreté ce qu’il a gagné en efficacité. Rafale de batterie à l’américaine, ou, à plusieurs reprises, un solo de guitare électrique pour ponctuer le morceau (Tu me regardes ou Mauvais rêves): une autre manière de pousser les curseurs. À l’inverse, en milieu de set, la Bruxelloise s’installe au piano, solo, pour enchaîner Taxi, Flemme et la fameuse reprise de Dick Annegarn qui a allumé la mèche, il y a maintenant six ans d’ici. La pause est bienvenue. Y compris pour certains dans le public qui commencent à se sentir mal dans la fosse de Forest, transformée en fournaise. La chanteuse doit même s’arrêter un moment: « Je peux pas continuer à chanter si l’un de vous est mal ». C’est bête, mais ce genre de petit grain dans des rouages déjà bien huilés – la tournée ne fait que démarrer – crée une respiration bienvenue (c’est le cas de le dire). Parce que derrière, la dernière ligne droite est imparable, avec sa pelletée de tubes: La loi de Murphy, Balance ton quoi, ou la reprise de Fever, son duo avec Dua Lipa. En rappel, Damso est de la partie pour Démons – la coolitude de son arrivée sur scène étant proportionnelle à l’hystérie qui s’est emparée de la salle. En toute fin, Bruxelles je t’aime rajoute une dernière couche de chantilly sur la gaufre, dans laquelle la chanteuse se permet enfin de croquer à pleines dents, semblant enfin profiter du moment de communion.       

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