Weeknd prolongé

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Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

TROISIÈME ALBUM D’ABEL TESFAYE, BOOSTÉ PAR LA COLLABORATION AVEC DAFT PUNK, STARBOY ÉCHAPPE, DE JUSTESSE, À LA SUPERPRODUCTION POP STÉRILE.

The Weeknd

« Starboy »

DISTRIBUÉ PAR UNIVERSAL.

6

Rappelez-vous. C’était il n’y a pas si longtemps. Il y a plus ou moins cinq ans, Abel Tesfaye débarquait sur la scène musicale, avec le projet The Weeknd, incarnation discrète, volontairement nimbée de mystère. Le genre à préférer se planquer dans l’ombre plutôt que de s’exposer frontalement à la lumière des projecteurs. Ce qui collait bien à la musique, soit dit en passant. En l’occurrence, un r’n’b dépressif, qui noyait son spleen amoureux dans des productions blêmes, voire fantomatiques, emmené par un timbre et des tics vocaux rappelant volontiers Michael Jackson (il reprend Dirty Diana en concert).

Petit à petit, Tesfaye migrera cependant de la marge branchée au centre de la pop mondiale. Adoubé dès le départ par Drake, il se retrouvera bientôt à jouer les invités de luxe aux côtés de Sia ou Ariana Grande, Beyoncé ou Kanye West. Mais le grand saut, c’est avec l’album Beauty Behind the Madness qu’il le fera réellement. Deuxième album officiel du bonhomme, il lui permet alors d’accentuer sa mue. La transformation passe notamment par le single Can’t Feel My Face. Bénéficiant de la patte du hit-maker suédois Max Martin, le titre deviendra le plus gros tube de The Weeknd, désormais mis sur orbite.

Back to the future

Un an à peine plus tard, Tesfaye est déjà de retour. Pressé, le Canadien a même interrompu sa tournée en première partie de Rihanna pour boucler les enregistrements de ce Starboy au plus vite. Comme attendu, le partenariat avec Max Martin y est renouvelé, via le titre Rockin’, aussi efficace que peu aventureux: un exercice easy house à la Disclosure, calibré pour cartonner. Avant même la parution de l’album, la grande nouvelle restait cependant l’annonce de la participation de Daft Punk au projet. Rare, le duo français s’est glissé sur deux titres: à peine identifiable sur le single Starboy, sa patte est beaucoup plus prégnante (voire caricaturale) sur I Feel It Coming. Sans qu’aucun des deux morceaux ne parvienne vraiment à rencontrer les attentes suscitées par ce qui se présentait comme une « rencontre au sommet ».

Si c’était l’occasion pour The Weeknd d’aller gratter plus profondément dans les années 80 -une des marottes des Français casqués-, il le fait avec plus de réussite quand il s’allie par exemple avec Roland Orzabal, samplant son groupe Tears for Fears, sur Secrets. Sur Sidewalks, Tesfaye change encore de registre, lorgnant la soul vintage à la Raphael Saadiq (laissant de la place pour l’inévitable featuring de Kendrick Lamar).

Tout ne fonctionne pas aussi bien sur Starboy. Avec 18 morceaux, s’étendant sur près de 70 minutes, l’album est copieux. Trop pour ne pas connaître de baisse de régime. Certes, la superproduction permet à Tesfaye d’à la fois confirmer sa patte (All I Know, avec Future), de tester différentes formules et de s’éloigner toujours plus de la proposition claustrophobe de départ. Mais sans vraiment réussir à définir une direction claire. On ne peut pas tout avoir…

EN CONCERT LE 03/03, AU SPORTPALEIS, ANVERS.

LAURENT HOEBRECHTS

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