Owen Pallett ne se fait plus appeler Final Fantasy mais sort comme prévu Heartland, son troisième album. Rencontre à Paris avec le roi de la pop à cordes.

Owen Pallett n’est jamais bien loin du meilleur album de l’année. Quand il ne batifole pas avec Arcade Fire, le violoniste donne un coup de main à Zach Condon alias Beirut ou signe les cordes pour les Last Shadow Puppets. Qui dit mieux? Ceux, rétorqueront les mauvaises langues, qui rencontrent autant de succès avec leur musique qu’avec celle des autres. 1-0. Balle au centre. Car malgré des critiques élogieuses parlant de meilleures paroles de l’année ou de concerts sacrant un illusionniste pop, on ne peut pas dire que Final Fantasy ait vendu des camions de Has a good home et He Poos Clouds, ses deux premiers disques, sortis en 2005 et 2006.

 » Je ne ressens pas la moindre once d’amertume, assure le Canadien né à Toronto au début des années 80. Le succès de mes amis me rend heureux. Même dans le cas de Grizzly Bear. J’avais travaillé avec les New-Yorkais par le passé mais pour Veckatimest , ils ont préféré collaborer avec Nico Muhly. Il vivait dans la même ville qu’eux et les membres du groupe pensaient que ça collerait davantage à ce qu’ils recherchaient. Au début, j’étais triste. Je travaillais avec eux depuis longtemps. On a même tourné ensemble. Et tout à coup, ils ne voulaient plus de moi… Mais dans le fond, on s’en fout. Ils ont enregistré un album fantastique et les arrangements de Nico sont incroyables. »

Pallett est charmant, distingué, classe et doué. Ça suffit à expliquer que tout le monde s’arrache ses talents. De Fucked Up aux Great Lake Swimmers. De Death From Above 1979 à Light-speed Champion. De Holy Fuck à Mika.

 » Pour le Last Shadow Puppets, je me suis assis avec Alex Turner et on a parlé musique. On a discuté des albums et des arrangements qui nous plaisaient. Puis je me suis immergé. J’ai essayé de faire en sorte que le disque sonne comme on le désirait en y apportant ma petite touche personnelle. J’ai créé des versions sur ordinateur des arrangements et je les lui ai envoyées. Quand les groupes savent clairement ce qu’ils veulent et peuvent me fredonner les cordes, je deviens un secrétaire plus qu’un arrangeur mais je trouve toujours l’expérience aussi fantastique. »

Owen est tellement demandé qu’il galère à prendre du temps pour lui. A développer ses propres projets. Il a ainsi eu du mal à se focaliser sur Heartland, son troisième album.  » On me commandait une partie de symphonie à Vancouver. On me sollicitait du côté de la pop et du rock indé. Puis, il y a des choses qui ne se refusent pas. Comme les Pet Shop Boys. »

Même quand en plus de tout ça, on flirte avec le cinéma. Infatigable, Pallett a coécrit, orchestré et conduit avec Win Butler et Régine Chassagne d’Arcade Fire la B.O. de The Box. Thriller de Richard Kelly ( Donnie Darko) avec Cameron Diaz. Il se cache aussi derrière la musique de Rabbit Hole, le prochain John Cameron Mitchell. Pas plus que le réalisateur de Hedwig and the Angry Inch et Shortbus (mais aussi de clips pour les Scissor Sisters), Owen ne fait mystère de son homosexualité. Il affirme même qu’elle influence implicitement sa musique.

Game Over

Heartland, Owen a commencé à plancher dessus à l’été 2008. Il lui a donné naissance en 9 mois, le temps d’une grossesse. Et, moins courant, a accouché dans 4 pays différents. Les Etats-Unis et le Canada. Mais aussi l’Islande, où il a enregistré dans les studios de Sigur Ros avec Jeremy Gara (batteur d’Arcade Fire), et la Tchéquie où il a retrouvé Mark Ronson et collaboré avec l’orchestre symphonique national.

L’album, ambitieux, sonne comme un sombre conte de fées et raconte l’histoire de Lewis, un jeune fermier psychotique ultra violent.  » Plus généralement les début, milieu et fin d’une relation chantée par l’objet de mon affection, précise le maître de la pop orchestrale. J’étais satisfait de mes disques précédents mais surtout en termes d’écriture. Avec ce nouvel album, je voulais aussi pouvoir être fier de la production. »

En attendant, il y a quelques semaines, l’artiste annonçait abandonner définitivement Final Fantasy, son nom de scène. Une appellation dont le copyright est détenu par l’éditeur de jeux vidéo Square Enix. Heartland, son nouveau disque, sort donc sous l’étiquette Owen Pallett tandis que ses albums précédents seront repressés.

 » Je ne suis pas accro aux jeux vidéo. Deux ou trois fois par an, j’ai une montée et je loue Battlestar Galactica », plaisante le Canadien. N’empêche qu’à 12 ou 13 printemps, il composait déjà la musique de Traffic Department 2192. Un jeu créé par son frère, de 5 ans son aîné. Ça peut sembler étrange pour le fils d’un organiste d’église qui a étudié le violon classique.  » J’étais obsédé par les musiques de toutes ces consoles étant gamin. Konami avait des bandes-son incroyables. Si elles avaient été interprétées avec des instruments traditionnels, elles auraient sonné comme du trash métal. En plus compliqué encore. Depuis, les technologies ont changé. » Rien n’est éternel…

Owen Pallett, Heartland, Distribué pAR Domino.

www.myspace.com/owenpallettmusic

Texte Julien Broquet

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