Un autre Blutch

Une « saison Blutch » s’ouvre à Strasbourg via, entre autres, deux grandes expositions. Une monographie donne à voir l’illustrateur plus que le bédéiste.

Du 22 mars au 30 juin, inutile d’ergoter: les amateurs de Blutch, de beaux dessins ou juste de beau n’ont d’autre choix que de mettre Strasbourg à leur agenda, souligné en rouge. La ville natale de Gustave Doré et de Tomi Ungerer va en effet y célébrer cet autre enfant du pays via une « saison Blutch » organisée dans le cadre des Rencontres de l’illustration, via entre autres deux expositions, l’une au Musée Tomi Ungerer, l’autre au Musée d’Art moderne et contemporain, et toutes deux se proposant de présenter l’autre versant du travail de Blutch qui cette fois ne relève pas directement de la bande dessinée ou du dessin d’humour: peintures, dessins, illustrations, recherches, couvertures… Une oeuvre rarement montrée, rassemblée ou publiée, et qui fait d’ores et déjà l’objet d’une monographie que les amateurs susdits vont devoir s’arracher: elle donne à voir à quel point l’auteur né en 1967 se nourrit à d’autres formes artistiques que la seule bande dessinée, qui parfois  » tend à enfermer et scléroser le dessin« . Or dans cet Autre paysage, pas de sclérose à craindre, juste peut-être une succession de syndromes de Stendhal (des vertiges dus à la beauté des oeuvres d’art) ou de fractures nettes de l’oeil droit (comme disait IAM): tant de talent, c’en est presque indécent.

Un autre Blutch

Jazzman du dessin

Peinture, cinéma, jazz, photographie, livre d’images… Les champs d’exploration et d’inspiration ont toujours été multiples chez Blutch, et se retrouvent tous à des degrés divers dans son oeuvre extrêmement féconde, que l’on connaît pour l’essentiel sous forme de bande dessinée. Or, si celle-ci occupe une place prépondérante dans ses passions -on l’a vu avec Variations dans lequel il revisite 30 classiques, et bientôt avec sa propre interprétation de Tif & Tondu-, c’est bien le dessin en lui-même, ce pur plaisir du geste et du trait, qui meut et émeut Blutch. Un dessin lui-même nourrit à de multiples sources artistiques: des maîtres revendiqués tels Saul Steinberg, Georges Beuville ou Gus Bofa, le jazz qui l’amène à  » rejouer des standards« , le cinéma qui hante son imaginaire, la peinture qui l’attire de plus en plus… C’est tout ce travail, cette fois expurgé de narration, qui est à voir à Strasbourg et dans ce beau livre, via des dizaines de dessins et illustrations réalisés depuis 1994. Or quels que soient les techniques (crayon, fusain, pastel, encre, plume, stylo, pinceau) et les sujets choisis (des portraits aux décors de théâtre en passant par des illustrations et des couvertures de magazine), une évidence s’impose: chez Blutch, il n’y a vraiment rien à jeter.

Un autre paysage

De Blutch, Éditions Dargaud. 240 pages.

9

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content