Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Queens Of The Zeppelin Age – Quand le mythique bassiste de Led Zep se met en ménage avec Dave Grohl et Joshua Homme, rock stars américaines de la génération suivante, le résultat fait fondre la banquise. Peut-être plus que les cours.

« Them Crooked Vultures »

Distribué par Sony.

La pochette est un peu laide, un peu raide, un peu sinistre: un dessin d’un buste humain en costard coiffé d’une tête de vautour. Bienvenue dans le power trio le plus hype depuis (?) Cream, en 1968! Enregistré prestement, presque sous camouflage, le disque est pourtant le résultat de fréquentations déjà établies. Grohl a été batteur invité sur l’album 2002 de Queens Of The Stone Age, le groupe viril de Joshua Homme. Et quand Foo Fighters remplit à deux reprises Wembley en juin 2008 – 86 000 spectateurs chaque soir -, la bande à Grohl, en apoplexie, est rejointe par Jimmy Page et JP Jones dans deux standards de Led Zep. Ceci posé, on n’a jamais bien compris l’hystérie autour des surévalués Foo Fighters – suiveurs plus qu’inventeurs – et de la personnalité agaçante de l’ancien batteur de Nirvana. Un type mettant en question, avec son groupe, le lien entre HIV et sida(1) ne peut être qu’un crétin ou un usurpateur: c’est peu dire qu’on n’a guère d’estime pour les chansons poudreuses de Grohl. Par contre, on lui reconnaît des capacités derrière les drums, une nouvelle fois confirmées dans l’actuel projet, où il sonne plus que jamais comme un carbone idéal de John Bonham, l’enclumeur du Zeppelin mort en 1980 après absorption de 40 vodkas… Il en suit la lourde empreinte dans ces 13 morceaux composés en trio avec Homme et Jones.

Le troisième Homme

Les arrangements, même s’ils ne lui sont pas directement imputés, portent clairement la marque tactile de Jones, comme le clavinet de Scumbag Blues et, plus généralement, les breaks et parenthèses surprises telles que la fanfare troisième âge en fin du deuxième titre. Et Homme? Il dirige la man£uvre aux chant et guitares, tous deux parfaitement circonscrits et exécutés, de cette manière plombée qu’on lui connaît. Sa présence dessine des morceaux très physiques, ancrés dans un hard blues intemporel et organique, arc-bouté sur des saillies proches du métal. Parfois, les vocaux prennent l’allure de succursales polyphoniques de Bowie ( Elephants, Caligulove), le plus souvent, ils sont dans l’esprit de chansons conçues en multicouches musicales. Quelques titres ne sont pas loin d’être remarquables: le déjà cité Elephants, un Gunman qui recrache quelques relents électro dans sa marée heavy et Scumbag Blues où la science du riff d’Homme tourne à plein rendement. Pas pour rien que Jones était un membre fondamental de Led Zep et Homme toujours un producteur recherché, même dans les contre-emplois (il a travaillé sur le dernier Arctic Monkeys): ces types savent faire sonner un disque. Pour passer au palier supérieur, celui de classique, il manque sans doute une caractéristique sonore plus fulgurante et quelques morceaux absolus, insubmersibles. On s’en approche, mais c’est comme si on restait en rade du chef-d’£uvre fantasmé.

(1) En 2000, Foo Fighters a soutenu l’organisation controversée Alive & Well qui conteste le lien entre HIV et sida.

www.themcrookedvultures.com

Philippe Cornet

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