Dans le Hep Taxi! ertébéen, pressé de choisir entre le Bien et le Mal, Daniel Darc joue la carte du « mort en puissance ». Drôle de drame.

C’est un taxi, de nuit évidemment, dans lequel embarque le survivant des années poudre et du tube Cherchez le garçon de Taxi Girl (1980). Doté d’un nouvel album solo archi-mélancolique, le très beau Amours suprêmes (Universal), Daniel Darc installe sa drôle de carcasse dans le véhicule croisant les néons décolorés des rues bruxelloises.  » Je suis parano, j’ai rien pris, mais là, j’ai carrément l’impression que l’on me prend en photo.  » Bien vu Daniel, toutes ces caméras sans opérateur visible te mettent en boîte pour Hep Taxi!, émission de service public qui tente d’éviter le tout promo en privilégiant les déambulations de la route et de l’esprit.

LE BIEN ET LE MAL

Darc répond aux réflexions de Jérôme Colin, bien décidé, semble-t-il, à trancher la question délicate du Bien et du Mal. Autant dire qu’avec Darc, cela revient à essayer de peser le vent ou de manger la pluie. Non pas qu’il n’ait pas conscience de ses « excès », mais pour lui, les choses sont claires:  » Qu’est-ce que tu veux foutre d’une vie pénarde? « , répond-il au chauffeur qui le moralise sur les dangers d’une vie dissolue.

Darc nous entretient de sa famille,  » Mon père est mort, ma grand-mère est morte à Auschwitz, les autres, je ne sais pas. On est très cosmopolites (…).  » Et prend soin de demander la configuration familiale de l’interviewer:  » T’as de la famille? Des enfants? Combien? (…) Trois mômes! Tu vas continuer ou t’arrêtes-là? »

ATTENTION, DANGER!

Pas sinistre pour un sou, Darc se révèle doué en matière d’humour noir. Lorsqu’il joue à l’harmonica une version rustique de La pluie qui tombe, Colin applaudit, glissant toutefois qu’il est le  » plus petit public du monde« . Darc rétorque:  » J’ai connu pire, une fois il n’y avait qu’un mec et il lui manquait une jambe » (rires). D’autres thèmes sont abordés: l’amour qui engendre le mystérieux.  » Dès que tu commences à baiser, t’aimes la voisine » et une intéressante discussion prophylactique sur les morpions garantis expérience perso. Oui, on rit et on s’accroche, comme Darc s’accroche à sa bouteille de Baileys, revêtue d’un vain plastique bleu.

Les images d’archives défilent: on y voit un beau gosse, posant au jeune homme moderne des années 80. Mais le look vintage se dégrade, y compris dans le Taxi. Darc finit par descendre de la voiture pour écouter un trio de jazz et là, courbé, voûté, cassé, la note globale du « danger » s’affiche violemment à l’écran. Un peu plus tard, Jérôme Colin montre un visage, le sien, qui ne traduit plus ni le Bien ni le Mal. Juste l’effroi.

LA CHRONIQUE DE philippe cornet

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