22.50 LA DEUX

DE JEAN-CHRISTOPHE YU. DANS LE CADRE DE L’éMISSION QUAI DES BELGES SUR LE THèME: « L’ART MURAL, ENGAGé ET URBAIN ».

« C ‘est l’une des choses dont je suis le plus fier: avoir fait pénétrer à l’Otan une tapisserie, Le triomphe de la Paix, qui était contre eux et qui partait d’un poème de Bertolt Brecht », dit Somville avec un accent bruxellois à couper à la gueuze. C’est le début du film, et quelques types cravatés en noir et blanc sixties scrutent septante-cinq mètres carrés d’un « Cheval de Troie dans l’organisation guerrière (…) d’un artiste majeur ». Le ton, un rien hagiographique, est confiant dans un artiste qui « restera dans l’Histoire ». Si la pérennité de l’£uvre de Somville est discutable, son engagement ne l’est pas. Il croit au communisme et à la puissance d’un art mural tendance XXL, comme sa fresque de 600 m2 au métro bruxellois Hankar. Le résultat visuel se trouve quelque part entre la tragédie à la Goya – dans des couleurs volontiers criardes – et le réalisme soviétique, pour les traits les plus convenus. Mineurs statufiés dans une douleur noire, gueules ouvertes de la souffrance et figures fantasmagoriques symbolisant la « diarrhée intellectuelle » des critiques d’art qui ne vibrent pas à ses toiles. Somville est meilleur dans la douceur picturale (ses femmes à la plage) que dans l’offensive dogmatique. Ou quand il soulève quelques lièvres incongrus, comme le côté politique de Rubens qui a su « si bien peindre les noirs, les arabes, parce qu’ils étaient déjà là ».

INéGAL

Le film, trop long – une heure douze minutes – évite des points aussi importants que les limites de l’engagement de l’artiste dans une idéologie communiste, plutôt borgne sur le sens de sa propre histoire. Somville lasse par ses certitudes péremptoires du type « N’est engagé que l’homme de gauche » ou « De tous les peintres réalistes, je suis le plus connu ». Dommage parce que le contexte de l’Histoire (de l’Art) de la Belgique des cinquante dernières années est bien porté par des documents souvent pertinents. Dommage aussi que la fin du doc expliquant les raisons de l’engagement politique du peintre n’ait pas été montée en amont: elle nous rend le personnage plus humain.

Ph.C.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content